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mercredi 30 mars 2016

Printemps des Poètes :Les Bretons


La 18e édition du Printemps des Poètes s’achève. Rappelons qu’elle a pour objectif de mettre à l’honneur les auteurs du XXe siècle.

Aujourd’hui : la Bretagne et ses poètes
‭Guillevic, René-Guy Cadou, Charles Le Quintrec

PLOUMANACH

‭   La Bretagne est une terre de poésie. Ses paysages sublimes ont inspiré les Bretons et de nombreux poètes venus d’autres régions. La mer et les rochers impressionnants, la lande où courent les vieilles légendes, les pierres dressées, vestiges des temps préhistoriques ont été pendant des siècles - et sont encore ajourd’hui - des sources intarissables d’inspiration.
‭Parmi tous les poètes bretons de naissance ou s’étant installés en Bretagne, il fallait faire un choix. J’ai retenu trois noms : Eugène Guillevic, René-Guy Cadou et Charles Le Quintrec.

‭   Guillevic (1907-1997) est l’un des plus brillants poètes  du 20e siècle. Il exerçait un métier pour vivre (il a travaillé notamment à l’Inspection générale de l’‬Économie) ; citoyen engagé il a été longtemps membre du Parti communiste. poète innovant, il a choisi la concision et la densité pour exprimer sa solidarité vis-à-vis des choses, de la nature et des hommes. 
Né à Carnac, il a souvent évoqué sa ville natale :
“ Nulle part comme à Carnac
Le ciel n’est à la terre,
Ne fait monde avec elle..”
Son engagement politique se ressent dans de nombreux poèmes, comme dans Morbihan :
“ Ce qui fut fait à ceux des miens,
Qui fut exigé de leurs mains,
Du dos cassé, des reins vrillés...
Je ne peux pas le pardonner."

   René-Guy Cadou (1920-1951) fils d’enseignants et lui-même instituteur n’avait que douze ans quand sa mère est morte. Marié à Hélène, poétesse elle aussi, il écrit des vers dans lesquels la mélancolie est souvent présente. Il aime se souvenir de son enfance, de la “vieille classe de (s)on père", de l’odeur des pluies...
“ À se souvenir on gagne
Du bonheur pour des années”
écrivait-il en pensant à Sainte-Reine-de-Bretagne où il est né.


   Charles Le Quintrec (1926-2008) poète et romancier, récompensé par un Grand Prix de poésie de l’Académie française, écrivait des vers de forme classique. Si l’alexandrin n’est plus à la mode, il faut reconnaître qu’il donne au poème un rythme agréable à l’oreille.
Dans ses vers, Le Quintrec  exprimait sa foi et son amour de la Bretagne :
“ Vieux pays d’herbe et d’ombre où mon amour est sûr
Où l’enfant que je fus traîne un bout de chaussure
Un rêve à la façon de l’homme que je suis.”

   Guillevic, Cadou et Le Quintrec, trois poètes aux styles et aux thèmes traités différents. Ils démontrent la richesse de la poésie bretonne.

lundi 28 mars 2016

Regard (2016 - semaine 13) : Eternel printemps


 Éternel printemps


   Même si les signes de son retour ont été très discrets - imperceptibles en certains endroits - le calendrier le confirme : le printemps est arrivé depuis quelques jours.

  Le dernier week-end de mars est l’occasion d’un rituel auquel nous sommes habitués depuis quarante ans : le changement d’heure. Malgré les années qui passent, certains continuent de s’interroger. Faut-il reculer ou avancer sa montre d’une heure ? La technique qui n’a pas que des défauts apporte automatiquement la réponse aux hésitants ; c’est ce que font les ordinateurs, les smartphones et maints objets connectés.
Autre question qui revient tous les ans : ce changement d’heure est-il utile ? Selon une enquête récente, 77% des Français sont sceptiques sur ses bienfaits.
On applique encore cette décision prise après le choc pétrolier de 1973-1974 pour économiser l’énergie et réduire les émissions de CO2 sans connaître réellement son efficacité, faute d’étude d’impact depuis 2010.
Pour ma part, cette mesure n’est qu’un gadget insignifiant par rapport au problème global : seul le respect des rythmes naturels quotidiens et saisonniers serait efficace.

   
    Pâques, c'est aussi l'occasion de mettre l'œuf à l'honneur.
L'œuf, symbole de la germination, de la renaissance, promesse de vie, à la forme parfaite, univers clos protégé par une coquille qui paraît fragile à nos yeux d'humains mais résistante et coriace aux yeux du poussin qui cherche à s'en extirper quand vient l'heure de l'éclosion.

samedi 26 mars 2016

Une photo, une phrase n° 27 : le cap Blanc-Nez



   J'aime fixer l’instant que j'ai apprécié ou qui m'a ému. C'est pourquoi lors de mes promenades, de mes déplacements, de mes voyages, j’emporte  presque toujours  avec moi  un appareil photo, outil idéal pour garder  les images que la mémoire pourrait oublier.

La photo : le cap Blanc-Nez

   Cette photo du cap Blanc-Nez a été prise  au début du mois de mars depuis  la station balnéaire de Wissant située au sud de Calais. 
Situé sur la commune d’Escalles, le cap Blanc-Nez est considéré comme l’un des plus beaux sites côtiers français. Avec le cap Gris-Nez qui se trouve plus au sud, à une dizaine de kilomètres de lui, il constitue un des attraits remarquables de la Côte d’Opale. 







La phrase

   Ce jour-là de mars, le vent soufflait âprement au bord de la mer, les promeneurs encapuchonnés étaient rares sur la plage et je m’étais arrêté pour mieux apprécier ce paysage vu maintes fois et dont je ne me lasse pas : les falaises blanches du cap se dressaient devant moi, semblables à celles qu’on aperçoit de l’autre côté du détroit (à une époque lointaine l’Angleterre et la France étaient soudées) puis mon regard s’est attardé sur la lande verte et ses multiples plis, sur les énormes trous que  les bombardements ont formés ; dominant le paysage, la présence obsédante du  monument rappelle au promeneur le sacrifice des soldats britanniques et français morts lors de la dernière guerre dans ce cadre si paisible (la guerre  ne se laisse pas attendrir par les beautés de la nature).

vendredi 25 mars 2016

Printemps des poètes : Jouer avec le langage




   Ce qui caractérise la poésie, c’est la variété qu’elle présente, selon les époques (Antiquité, Renaissance, Classissisme, Romantisme, Symbolisme, Surréalisme...) et le caractère - ainsi que le style - des auteurs.
    Si les textes poétiques sont généralement marqués par la profondeur des thèmes abordés, il n’est pas rare d’y rencontrer l’humour ou l’ironie (chez Prévert et Henri Michaux par exemple).
  De nombreux poètes aiment jouer avec les mots. Le travail sur le langage propre à l’œuvre de Francis Ponge n’est pas un simple divertissement, il est une mise en cause de la poésie “sacrée" et nécessite  de lutter avec les mots : ceux-ci sont la matière première dont le poète cherche à tirer des effets  originaux.

  

mercredi 23 mars 2016

Solidarité avec la Belgique




  Le terrorisme a encore frappé. Cette fois, c’est la Belgique qui a été visée. Si l’on ne considère que les derniers attentats ayant eu lieu en Europe, on constate que les cibles n’ont pas  été choisies au hasard. En janvier 2015 à Paris, c’est un journal symbolisant la liberté de la presse qui avait été touché. Quelques mois plus tard en novembre, c’étaient des lieux de détente - un stade, une salle de spectacle, des restaurants  - qui étaient la cible des barbares, deux endroits où les gens étaient nombreux. Hier, à Bruxelles  et à Zaventem, les terroristes ont choisi de porter la mort dans des lieux consacrés aux transports : une station de métro et un aéroport, des lieux où les gens se pressent chaque jour, les uns pour se rendre à leur travail, les autres pour passer quelques jours de vacances. 
   Celles et ceux qui ont perdu la vie, qui aujourd’hui dans un hôpital luttent contre la mort ou soignent leurs blessures, sont des victimes innocentes. En ces heures douloureuses, chaque démocrate se sent solidaire du peuple belge. Cela  a été exprimé par l'ensemble de la communauté internationale. 
  Seules quelques voix discordantes ont été entendues, paroles indignes surtout quand elles émanent d’un ministre français dénonçant « une absence de volonté  et  la naïveté» de la part de certains responsables politiques belges.
Le ministre belge des Affaires étrangères lui a répondu dignement en l’invitant à  « regarder en face, ensemble  les problèmes qui se posent ».
    Dans le contexte actuel, aucun pays n’est à l’abri de nouveaux attentats.
L’heure est au recueillement. La recherche d’une solution globale, incluant l’analyse des causes de cette situation, s’impose de plus en plus.

lundi 21 mars 2016

Regard (2016 - semaine 12) : Cause(s) et conséquence(s)






Cause(s) et conséquence(s)

« Cause : Ce par quoi un évènement, une action humaine arrive, se fait..
Conséquence : Suite qu’une action, un  fait entraîne.»
(le Robert)

     Le médecin qui reçoit un patient se plaignant de douleurs à l’estomac ne va pas lui prescrire un médicament sans l’avoir interrogé, sans avoir demandé, s’il le juge nécessaire, des examens qui vont l’aider à établir un diagnostic. Il cherche la cause du mal avant de le soigner.
    Le bon professeur qui a devant lui un élève apathique, peu intéressé par le cours qu’il donne et qui rend de mauvaises copies  cherchera à comprendre les causes de l’échec de cet élève ( raisons familiales, problème de santé, mauvaise orientation...) parce qu'il veut le sortir de cette situation.
    Connaître les causes d’un problème est indispensable pour y trouver une solution. Cette règle doit  s’appliquer à tous, et particulièrement à ceux qui exercent de hautes responsabilités. Rares sont pourtant ceux qui le font.
Depuis des années, le chômage ne cesse de monter en France. Quelle en est la cause profonde ? On ne cherche pas à le savoir, on accumule les mesures inefficaces en choisissant des solutions simplistes, généralement venues du camp dominant. Le temps passe et aucune amélioration n’apparaît. 
Le terrorisme sévit à travers le monde. Il ne faut pas chercher à comprendre le phénomène, proclame, impérial, le Premier ministre, il faut agir immédiatement.
Sans réflexion préalable, le résultat n’est pas garanti et la démocratie est bafouée.

   D’un côté, on néglige la cause, de l’autre on oublie de penser aux conséquences. Il s’agit pourtant d’un élément essentiel de la responsabilité : quand on prend une décision on doit envisager les bienfaits et les inconvénients qu’elle va entraîner. S’il s’agit d’un projet économique ( comme un tunnel sous la mer) il faut s’interroger sur l’impact écologique de ce chantier, sur les effets négatifs qu’il aura sur le transport par bateau...C’est la vision sur le long terme  qui permettra de définir le meilleur projet.

   Or depuis plus de cinquante ans, on a construit n’importe où, produit n’importe quoi, sans se soucier des conséquences sociales et environnementales des actions humaines. 
    La situation dans laquelle se trouve le monde aujourd’hui résulte d’un manquement à une règle pourtant évidente : avant d’agir sur un problème, il faut chercher les causes et connaître les conséquences de l’action qu’on va mener.
Le changement est aussi dans la manière de faire.

vendredi 18 mars 2016

Coup de cœur : L’histoire du manchot fidèle



Coup de cœur, cette nouvelle rubrique veut mettre en valeur des gens, des œuvres, des lieux, des faits qui, dans le monde rude d’aujourd’hui, réconfortent et apportent des moments appréciables de bonheur. 



L’histoire du manchot fidèle

    À l’heure où des gens continuent de considérer que les animaux sont des “choses” qu’on peut vendre, blesser, tuer, sans penser un instant à l’aspect immoral de ces actes, l’histoire d’un jeune manchot appelé Dindim fait le tour du monde, embellie par certains journaux qui ont transformé le fait en exploit. Cette exagération n’était pas nécessaire : l’histoire de ce manchot est belle dans sa réalité.

   Jusqu’à maintenant on avait surtout connu des faits surprenants concernant les  grands singes si proches de l’être humain ou des animaux familiers : des chats perdus parcourant de longues distances pour retrouver leur maison d’accueil, des chiens se recueillant devant la tombe de leur “maître”... 


   Cette fois, il s’agit d’un oiseau. Il y a cinq ans, un Brésilien recueillait un petit manchot victime d’une marée noire. Il avait  le corps couvert de pétrole et il mourait de faim. L’homme le soigna pendant plusieurs mois. Comme il le raconte aujourd’hui, il avait pris soin de  l’oiseau comme il l’aurait fait pour son enfant.
   Quand le manchot est rétabli (onze mois plus tard) et qu’il s’en va  retrouver l’océan, l’homme pense alors qu’il ne  le verra plus. 

   Il se trompait. Chaque année, le manchot quitte sa colonie pour aller voir celui qui lui a sauvé la vie. L’oiseau a gravé dans sa mémoire l’épisode de son sauvetage. La reconnaissance, la fidélité, l’attachement à quelqu’un ne sont pas réservés aux humains ; un animal lui aussi sait remercier ceux qui l’ont aidé un jour.





mercredi 16 mars 2016

Bonjour des Hauts-de-France


WISSANT (62) - AU LOIN LE CAP BLANC-NEZ

   Il y a quelques mois, je me suis réjoui de voir la Picardie rejoindre le Nord et le Pas-de-Calais pour former une région plus forte. Culturellement, historiquement, cette union s’imposait. Bien sûr certains Picards se sentant plus proches de Paris que du Nord n’ont pas été contents. On peut les comprendre mais pour les satisfaire il aurait fallu redessiner les frontières de la Picardie.
     À titre personnel, je me sens à l’aise dans cette nouvelle région ; j’y retrouve mes racines picardes du côté paternel, artésiennes et flamandes du côté maternel.
     Il fallait trouver un nom à cette région. Grand Nord aurait été trompeur, cela aurait trop évoqué les grands espaces blancs de l’Arctique.
Et puis il y avait l’envie forte d’abandonner ce mot Nord qui fait penser aux corons de Pierre Bachelet, au vent et à la pluie qu’on aime seulement dans les chansons de Brel. C’est la raison pour laquelle les appellations Terres-du-Nord et Nord-de-France n’ont pas été choisies.
   Nordistes et Picards vivent désormais dans les Hauts-de-France, nom que le gouvernement devra officialiser prochainement (obligation qui montre les limites de l’autonomie des régions).
    Les géographes trouvent ce nom absurde. Il faut reconnaître que les hauteurs de la région sont modestes ( 212 m dans le Haut-Boulonnais, 271 m à Anor, dans le Nord). Rien d'étonnant puisqu'il fut un temps où notre région s’appelait les Pays-Bas français.
Ces géographes cherchent la petite bête ; ils ont oublié que lorsqu’ils étaient écoliers et que l’instituteur accrochait au mur la carte de France, Lille et Dunkerque, étaient là-bas, tout en haut de la carte et Amiens un peu en-dessous.
    Alors ne boudons pas notre plaisir, acceptons sans rechigner ce nouveau nom. Et longue vie aux Hauts-de-France ! (malgré le hiatus)


lundi 14 mars 2016

n° 1055 - Regard 2016, semaine 11)





Causes du mal et Graines d'espoir

   Le terrorisme vient encore de frapper en Côte d’Ivoire et en Turquie. En Allemagne, les électeurs ont sanctionné le parti d’Angela Merkel et l’extrême droite fait une percée remarquée. Je ne partage pas les idées de la Chancelière mais il faut lui reconnaître un certain courage dans la façon dont elle a géré la question des réfugiés. Les xénophobes, les racistes lui ont fait payer son empathie pour ceux qui se voient obligés de fuir leur pays en guerre. En France, le gouvernement s’enfonce dans une politique incompréhensible pour le peuple de gauche. Au lieu de retirer un projet de loi sur le travail inspiré par le patronat le plus réactionnaire, il poursuit des manœuvres désespérées pour amadouer les syndicalistes réformistes et des étudiants qui ont compris les dangers que présente cette loi.
   Tous ces signes sont liés : ils démontrent que le monde ne tourne plus rond, que les gens privés d’une information honnête (parce qu’elle est dans les mains de la finance) font de mauvais choix et que la plupart des politiques aveuglés par le goût du pouvoir  sont incapables de prendre la mesure du changement qu’il serait nécessaire de mettre en route.

   Nous sommes entrés dans le XXIe siècle et la pensée de ceux qui dirigent le monde a deux siècles de retard.
   Darwin disait que les espèces qui survivent sont celles qui savent s’adapter au changement. La faculté de s’adapter à une situation nouvelle est aussi une des définitions de l’intelligence.
  Les individus faisant preuve d’intelligence et portant des idées nouvelles ne manquent pas dans le monde. Ils sont parmi les sociologues, les chercheurs, les auteurs, les citoyens. Mais on n’entend pas leur voix.
    La société du profit préfère donner la parole à des philosophes médiatiques qui n’ont jamais créé le moindre concept (ce que Deleuze exigeait du vrai philosophe) mais vont sur le plateau défendre une religion, un pays ou la haine de l’étranger) ; l’écologie qui devrait être au cœur du projet politique de ce siècle est représentée dans les médias par quelques “stars” du système ou des opportunistes qui ont oublié les principes fondateurs de l’écologie ; l’information - pourtant indispensable au bon fonctionnement de la démocratie - est cadenassée pour cacher la vérité aux citoyens (si le coût réel du nucléaire et de l’agriculture industrielle était connu ceux-ci demanderaient sûrement d’autres politiques). 
Heureusement quelques médias indépendants résistent *  : Politis, Charlie Hebdo, Médiapart...). Mais leur influence reste trop faible pour entraîner un changement rapide.

    Les signes de résistance à cette société sans morale et sans imagination se font jour, ici et là, annonçant de nouvelles formes de luttes. Il faut, malgré les obstacles, semer sans cesse des graines d'espoir.

* Il y a quelques jours TerraEco a annoncé qu’il devait s’arrêter ; c’est une triste nouvelle.

samedi 12 mars 2016

Une photo, une phrase : Poésie



Le 18e Printemps des Poètes  qui se déroule ce mois-ci a pour thème le Grand XXe siècle, cent ans de poésie.

La photo :
   Les livres consacrés à la poésie peuvent être rangés dans plusieurs catégories : les recueils qui forment un ensemble cohérent ( les Fleurs du mal, Terraqué, de Guillevic...), les livres qui regroupent l’ensemble de l’œuvre d’un auteur ( Verlaine, Rimbaud...), les livres thématiques, comme ceux de l’excellente collection de Folio Junior, En poésie (l’arbre, la liberté, la fête, la Bretagne...), enfin les anthologies dans lesquels les poètes peuvent être regroupés par période ou par pays. Tous ces types de livres m’intéressent. Quelques-uns sont toujours à portée de la main.



La phrase

   Je plains l’homme ou la femme qui dit être insensible à la poésie car il se prive ainsi d’une des joies les plus fortes, celle qui permet d’accéder à la beauté, aux grandes émotions, à la compréhension du monde ; je plains celui qui ne sait voir la poésie qui est dans la nature, dans la vague qui rencontre le rocher, dans la goutte d’eau qui glisse sur la feuille, dans la perfection de la toile d’araignée, car la poésie n’est pas seulement dans les livres, elle est autour de nous, elle est en nous.

mercredi 9 mars 2016

Mars 2016 : 18e Printemps des Poètes




«J’appelle poésie cet envers du temps, ces ténèbres aux yeux grands ouverts.»
(Louis Aragon)

   Le 18e Printemps des Poètes  qui se déroule ce mois-ci a pour thème le Grand XXe siècle, cent ans de poésie.
Ce sera l’occasion de mettre à l’honneur les poètes du siècle dernier. Ils sont nombreux à avoir trouvé une place dans les anthologie. Parmi eux citons :
Apollinaire, Supervielle, Cendrars, Saint John Perse, Eluard, Breton, Aragon, Michaux, Ponge, Prévert, Queneau, Tardieu, Senghor, René Char, Guillevic, Césaire, Bonnefoy, Jaccottet, Jouve, Reverdy, Desnos, Follain, René-Guy Cadou, Andrée Chedid....

   La poésie n’occupe pas la place qu’elle mérite dans notre société. J’ai expliqué dans mon livre Changer d’ère - la société conviviale - les raisons  de ce désintérêt :
« La société moderne encourage les égoïsmes,‭ ‬les corporatismes,‭ ‬les luttes implacables pour parvenir à la réussite sociale qui permettra aux heureux élus d'obtenir la reconnaissance des autres et en même temps un train de vie satisfaisant.‭ ‬Elle laisse au bord de la route les exclus du système et elle néglige les valeurs non marchandes.‭ ‬C'est pourquoi la dimension poétique de l'homme qui lui permet de créer,‭ ‬de rêver,‭ ‬d'accéder à la beauté des arts a été jusqu'à maintenant négligée. ( page 38)

Dans ce livre, je rappelle aussi la dimension poétique de l’écologie. J'explique comment la société conviviale que j’appelle de mes vœux libèrera l’être humain : elle favorisera la créativité sous toutes ses formes et en particulier l’accès à la poésie.
« De Ronsard à Guillevic en passant par Victor Hugo et Verhaeren,‭ ‬nombreux sont les poètes qui ont célébré‭ ‬les valeurs ayant fondé l'écologie‭ ‬:‭ ‬les rapports harmonieux de l'homme avec la nature,‭ ‬le respect du vivant,‭ ‬la solidarité entre les êtres.
Tout le monde ne peut devenir Rimbaud mais il faut permettre à toute personne d'avoir accès à la beauté de ses textes.‭ ‬Un poème tel que‭ ‬Sensation illustre le réenchantement de la vie‭ ‬:

‭"‬ Par les soirs bleus d'hiver,‭ ‬j'irai par les sentiers,
Picoté par les blés,‭ ‬fouler l'herbe menue‭…
Je ne parlerai pas,‭ ‬je ne penserai rien‭ ‬:
Mais l'amour infini me montera dans l'âme,
Et j'irai loin,‭ ‬très loin,‭ ‬comme un bohémien
Par la nature,‭ ‬heureux comme avec une femme‭."

‭Comme chaque année, je contribuerai à cette nouvelle édition du Printemps des Poètes en évoquant quelques auteurs du 20e siècle que j’apprécie.

lundi 7 mars 2016

Regard (2016 - semaine 10) : Le réveil citoyen






Le réveil citoyen

    Depuis des mois, les décisions gouvernementales se succédaient, incompréhensibles pour les uns, saluées par l’opposition pour les autres. La prolongation de l’état d’urgence recevait, selon un sondage, l’approbation d’une majorité de Français, la question de la déchéance de nationalité n’avait pas entraîné une forte vague de protestation. La résignation semblait avoir gagné le pays et soudain voilà que le peuple se réveille : sous prétexte de simplification, le gouvernement veut modifier le droit du travail ; le projet donne satisfaction au MEDEF ( normal ! il semblait écrit par lui), du côté des travailleurs, l’accueil est différent : de nombreuses mesures inquiètent, notamment celles qui permettraient un licenciement plus facile.
   
   À l’initiative de Caroline de Haas, une pétition est lancée pour demander le retrait du projet de loi : en quelques jours, le nombre de signataires dépasse la barre du million de personnes. Dans deux jours auront lieu des rassemblements qui auront pour but de renforcer le mouvement contre ce projet dangereux. 
Hier soir sur une chaîne d’infos en continu, un débat avait lieu sur ce nouveau mode d’action utilisant Internet. Il opposait Caroline de Haas à Jean-Louis Debré. Débat intéressant car il permettait la confrontation de deux conceptions opposées de la démocratie : une vision moderne pour la première qui estime que voter pour une personne ce n’est pas lui donner un blanc-seing pour cinq ou six ans, surtout quand l’élu fait le contraire de ce qu’il avait promis. Pour le second, au contraire la seule légitimité est celle des élus à qui on délègue des responsabilités sans avoir un droit de regard sur l’action menée. Vision dépassée qui ne tient pas compte de la réalité de l’histoire : de tout temps, les luttes se sont révélées nécessaires pour améliorer le sort des gens : grèves,  manifestations dans la rue hier. À ces luttes anciennes, il faut ajouter désormais les outils fournis par Internet.

samedi 5 mars 2016

Une photo, une phrase n° 26 : La neige



J'aime fixer l’instant que j'ai apprécié ou qui m'a ému.  En voyage ou chez soi, l’appareil photo reste l’outil idéal pour garder  les images que la mémoire pourrait oublier.

La photo

   Cet hiver, la neige n’est pas encore tombée sur la Côte d’Opale (entre Dunkerque et Berck). Aucun déplacement n’a été nécessaire pour prendre la photo : il a suffi de me placer devant la fenêtre de ma chambre un après-midi de décembre, en 2009.



La phrase

  Si j’excepte les années d’enfance où l’hiver ramenait immanquablement les mémorables batailles de boules de neige et procurait la joie de dresser  des  bonshommes que j’espérais voir fondre le plus tard possible, la neige en tant que loisir ne m’a jamais passionné mais le spectacle des flocons drus  qui virevoltent avant de se poser sur le sol m’a toujours passionné et je regrette de ne pouvoir admirer depuis quelques hivers la colline et les arbres du jardin transfigurés par la couche de neige virginale qui les recouvre.

vendredi 4 mars 2016

Profiter du jour présent




   Vivre l’instant présent sans se soucier du lendemain. L’idée est ancienne. Horace,  Épicure,  préconisaient déjà cela avant notre ère.  
La littérature est la plupart du temps le reflet de l’époque qu’ont connue les auteurs. Au fil des siècles, la légèreté, la joie  de vivre n’ont pas toujours inspiré les poètes.

Au Moyen-Âge, l’espérance de vie était courte. Le plus grand poète du 15e siècle, François Villon, regrettait sa jeunesse alors qu'il avait à peine trente ans. À‭  cette époque, c’était normal. D’autre part, son style de  vie ne lui inspirait pas des odes à l’amour. Il connaissait mieux la hantise du gibet.

‭La Renaissance est la période qui a chanté le plus le désir de profiter du temps présent :
“ Cueillez, cueillez votre jeunesse”, c’est le conseil que donnait Ronsard à Cassandre.
‭Souvent le désir était accompagné de sagesse :
“ Celui n’est pas heureux qui n’a ce qu’il désire,
‭Mais bienheureux celui qui ne désire pas
‭Ce qu’il n’a point...” (Rémi Belleau).

‭Au siècle suivant, Corneille traite le thème de la fuite du temps avec cruauté et une certaine  arrogance ( il pense que ses vers, eux, ne vieilliront pas) :
“ Marquise si mon visage 
‭A quelques traits un peu vieux
‭Souvenez-vous qu’à mon âge
‭Vous ne vaudrez guère mieux.”

‭Le 18e siècle renoue avec l’épicurisme. Les philosophes invitent à cueillir le temps présent, mais de manière raisonnable. Le temps est à la réflexion, à la tranquillité de l’esprit.

‭Avec les Romantiques, c’est le mal-être des individus qui domine. Les jeunes auteurs ont l’impression de vivre dans “un monde en ruines”. Musset et Lamartine chantent la mélancolie, la nostalgie, “ le spleen”. Avec Baudelaire - nourri de romantisme - on ne parle plus de jeunes filles en fleurs mais de femmes dans leur tombe.

‭Le 20e siècle a connu trop d’épreuves - deux guerres mondiales, le nazisme, Hiroshima - pour que la littérature ne soit pas imprégnée de gravité.
“ Où en suis-je aujourd’hui ? Je ne sais au juste...
‭Ce n’est pas moi qui ai simplifié les choses, mais les choses horribles m’on rendu simple...” écrit René Char à son ami André Breton, en 1947. 
Dans la seconde moitié du siècle, de nombreux auteurs sont désenchantés.

‭Il est trop tôt pour savoir de quel côté penchera le 21e siècle. Retour à l’épicurisme ? Nouveau romantisme ? Cela dépendra de l’évolution de la société et de l'état du monde.

mercredi 2 mars 2016

Coup de cœur : Carmen, la gitane




Coup de cœur, cette nouvelle rubrique veut mettre en valeur des gens, des œuvres, des lieux, des faits qui, dans le monde rude d’aujourd’hui, réconfortent et apportent des moments appréciables de bonheur. 

Carmen, la gitane

       Prosper Mérimée (1803-1870) est connu pour avoir écrit de nombreuses nouvelles (par exemple Colomba qui raconte l’histoire d’une vendetta), mais aussi des essais historiques et des récits de voyages.
De lui on se souvient surtout aujourd’hui de la fameuse dictée pleine de chausse-trapes…et de Carmen, une nouvelle écrite en 1845 et publiée en feuilleton dans la Revue des deux Mondes.
  
   L’histoire se passe en Andalousie. L’héroïne est une jeune gitane d’une grande beauté, une rebelle qui fréquente des contrebandiers. Le brigadier Don José chargé de la conduire en prison tombe sous le charme de la bohémienne ; il la laisse s’échapper, devient bandit par amour. Mais Carmen est une femme libre. Don José l’apprend à ses dépens. Fou de jalousie il finit par la tuer.

Qui aurait pu imaginer que cette héroïne allait susciter un formidable engouement dans le monde entier, comparable à celui pour Esméralda, gitane elle aussi, née de l’imagination de Victor Hugo quelques années plus tôt, en 1831 ?

CARMEN, par HL DOUCET, 1884
   Une chose est certaine : c’est l’opéra de Georges Bizet composé en 1875 qui a contribué à créer la légende de Carmen. Bizet n’a pu connaître le succès retentissant de son œuvre : il est mort quelques mois plus tard, à l’âge de 37 ans.

   Pourquoi le personnage de Carmen est-il si envoûtant ?
Au 19e siècle, une femme issue de la communauté gitane intrigue. Elle fascine par sa beauté, elle étonne une société où la femme est reléguée au second plan, dans l’ombre du mari. Au 21e siècle, le charme subsiste toujours.
Carmen est une femme libre, elle ne cesse de le chanter :

«‬ Mon cœur est libre comme l’air‭ ! 
J’ai des galants à la douzaine,‭ 
Mais ils ne sont pas à mon gré.‭ 
Voici la fin de la semaine,‭ 
Qui veut m’aimer‭ ? ‬Je l’aimerai‭ ! 
Qui veut mon âme‭ ? ‬Elle est à prendre‭ !‬ ‭»‬ 

 Libre et sincère.‭ ‬Elle prévient ses prétendants :

«‬ L'amour est enfant de bohème‭
‬Il n'a jamais jamais connu de loi‭
‬Si tu ne m'aimes pas je t'aime‭
‬si je t'aime prends garde à toi. ‭»

Théophile Gautier voyait en Carmen l'incarnation du diable :

«‬ Carmen est maigre,‭ ‬-‭ ‬un trait de bistre ‭
‬Cerne son œil de gitana. ‭
‬Ses cheveux sont d'un noir sinistre, ‭
‬Sa peau,‭ ‬le diable la tanna. ‭»

Je préfère penser qu’elle incarne la femme libérée.






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