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samedi 30 mai 2015

Humeurs n° 6 : Trains. Attention, danger !

« Ça ne fait rien, nous vivons un temps bien singulier ” 
( Georges Brassens - L’épave)

Les billets regroupés dans cette catégorie illustrent cette sentence qui n’a pas pris une ride depuis 1966



TRAINS : Attention danger !

C’est un rapport du député socialiste Philippe Duron auquel il faut faire beaucoup de publicité. Non pas pour sa qualité, ou son originalité. Tout au contraire ! Ce rapport, présenté comme un  plan choc pour sauver le train est une menace pour l’avenir du transport ferroviaire. Et il faut réagir pour qu’il ne soit jamais appliqué !

Résumons brièvement la situation :
- Pendant des décennies, à partir des années 60, l’Etat a fait le choix de privilégier le transport routier ; la France a vu se multiplier les autoroutes. Et le ferroviaire s’est dégradé progressivement ( matériel vieillissant, fermeture de gares...
À partir des années 80, les régions, nouvellement créées, ont beaucoup investi pour améliorer le transport ferroviaire qui en avait bien besoin : elles ont commandé de nouvelles rames, ont rénové des gares.  Le TER ( Transport express régional) s’est développé.

De son côté, la SNCF a misé  sur le TGV, belle innovation technique permettant de concurrencer l’avion sur de longues distances mais qui ne peut suffire seul.
Pour un aménagement harmonieux du territoire, trois types de transport ferroviaire sont nécessaires : le TGV pour les lons trajets, les  trains Corail - ou Intercités - pour des distances moyennes (par exemple Paris-Boulogne) et le TER qui relie les villes d’une même région.
Je suis profondément attaché au train pour trois raisons ; la première est celle que je viens de rappeler : il contribue à l’aménagement du territoire. 
La seconde est son intérêt écologique : dans une période où tout doit être fait pour lutter contre le réchauffement climatique, proposer de fermer des lignes ferroviaires  pour mettre les voyageurs dans des autocars est incompréhensible dans le contexte de la transition énergétique. 
Enfin, il y a l’aspect social : les tarifs du train doivent être à la portée de tous.I l suffit de faire parler les chiffres pour démontrer que les trains Corail doivent être maintenus :
En TGV : le coût moyen d’un aller et retour Boulogne- Paris est de 70 euros ; en train Corail, il est de 30 euros.

Je prends le train régulièrement depuis longtemps et j’appréciais beaucoup le Corail.
Au fil des ans, j’ai pu noter la dégradation du service : des voitures dont les portes étaient bloquées, des toilettes indisponibles, des retards fréquents...
Mon dernier déplacement à Paris, au début du mois, a montré que la situation s'aggravait : on nous a fait changer de train à Amiens (la ligne est  en principe directe)  sans explication !   Entre Amiens et Paris, la plupart des gens étaient debout, serrés comme dans un métro aux heures de pointe. Le train a changé de trajet ( sans doute à cause de travaux), ce qui a occasionné un retard. Sans explications, sans excuses.
Et ensuite on écrit des rapports pour constater qu’il y a un problème avec les trains Intercités !
Si la SNCF et l’Etat - autorité organisatrice - respectaient davantage les usagers, il y aurait plus de monde dans les trains et la planète se porterait mieux !




jeudi 28 mai 2015

Débattre, difficile exercice

Assemblées, comités, commissions, conférences, réunions publiques, congrès, colloques...les occasions de débattre ne manquent pas, mais le débat fécond, celui où chacun écoute l’autre, celui d’où naissent des idées nouvelles, est bien rare.


Le débat est le moteur de la démocratie. J’ai à plusieurs reprises  regretté ces derniers temps l’absence de vrais débats sur des questions essentielles. Tout le monde a encore en mémoire la tragédie de Sivens. La cause de celle-ci était un manque de démocratie.
Entre l’intérêt général (dans ce cas-là, la défense de la biodiversité) et les intérêts particuliers, il n’y a pas à hésiter : le premier doit l’emporter. 

L’exercice de la démocratie n’est pas chose facile. Le système  représentatif a montré ses limites ; quant à la démocratie participative - encore peu pratiquée - elle risque, si les règles ne sont pas  précisément définies, d’être confisquée en partie par les groupes  ou les individus les plus actifs, par ceux qui sont plus aguerris aux techniques du débat.

Certains pensent que le  débat devrait avoir pour but la recherche du consensus. Si celui-ci peut convenir dans certaines circonstances, dans de nombreux cas il est nécessaire de faire des choix.
Face à un projet de fermeture de ligne de chemin de fer, par exemple,  il n’y a que deux réponses possibles : on y est favorable ou on est contre.

Le débat est la confrontation entre des idées différentes. Cela ne demande  pas forcément un affrontement brutal ; au contraire, sur certains points précis, la rencontre des idées peut aboutir à un compromis honorable pour les parties en présence.


Dans la réalité, le débat ne se fait pas seulement sur des idées.  Vous y croisez l’agressivité de l’un, la mauvaise foi de l’autre, l’indifférence, le scepticisme, la flatterie,  vous vous heurtez aux mensonges, à la volonté de nuire, à l’arrogance du prétentieux, vous subissez les injures du malotru, les sarcasmes du jusqu’au-boutiste...Stoïquement vous résistez à ces interventions peu agréables car le débat doit être poursuivi.

N’oublions pas que les progrès sociaux  ont été acquis depuis  l’antiquité à la suite de conflits et de luttes.La lutte a donc son utilité. Mais comme  disait le poète : « Rien n’est jamais acquis à l’homme ».
Après le progrès, la régression menace toujours. C'est ce qui contraint l'Homme à poursuivre sans relâche le combat pour des idées meilleures.

mardi 26 mai 2015

Pour éviter le pire


Le Carnet de Bord livre chaque semaine des réflexions sur notre époque, inspirées par mes activités, mes loisirs, mes sorties et l'actualité. Ces libres cheminements ont pour but  de faire entendre « la rumeur du temps présent ».



J’ai consacré mon précédent billet à l’entrée de Jean Zay  au Panthéon. J’aurais pu  aussi évoquer les trois autres résistants qui vont avoir cet honneur : Germaine Tillion, Geneviève de Gaulle-Anthonioz ou Pierre Brossolette. Et pourquoi pas l’ensemble des résistants qui ont lutté pour faire reculer le nazisme et préserver nos libertés ?
Parce que, si le Panthéon a pour but d’honorer des personnages dont notre pays est fier, il serait sans doute plus juste, pour certains, de leur associer tous ceux qui ont agi avec la même conviction qu’eux.
Choisir ceux qui vont  entrer au Panthéon a toujours un côté arbitraire. Mais ce choix a la plupart du temps une valeur symbolique. 
Cette année, deux femmes sont mises à l’honneur ; cela traduit une évolution de la société française qui, peu à peu, donne à la femme la place qu’on lui a longtemps refusée.
Quant au choix des résistants, il permet de rappeler aux plus jeunes  un passé qui est encore proche puisque certains d’entre nous l’ont connu.

Si j’ai  choisi de rendre hommage à Jean Zay, c’est avant tout parce que sa vie, son parcours, son action en tant que ministre de l’Education nationale, me semblent propices à une réflexion sur le présent et l’avenir.
Il arrive qu’on compare l’époque actuelle  aux années 30. Bien sûr, il y a eu au cours de ces années-là une grave crise économique, une forte  poussée de l’extrême droite, la montée de l’antisémitisme, dont Jean Zay fut l’une de victimes. Mais il y a eu aussi de 1936 à 1938 des années d’espérance, de réformes, de progrès social, que Jean Zay représente également.

L’antisémitisme et le racisme en général n’ont pas encore été éradiqués, bien au contraire, et il peut être utile de rappeler en cette période de  doute, les dangers qu’ils représentent.
Quant à la crise économique qui peut pousser certaines personnes sans espoir à se jeter dans les bras d’illusionnistes, elle n’est pas près de se terminer si l’on ne rompt pas, au niveau de l'Europe, avec l’austérité qu'elle nous impose.

L’espérance que représentait le Front populaire fut brisée en avril 1938 par un changement de politique incarné par Daladier  et déboucha peu après sur la plus désastreuse guerre que le monde connut.
Ces évènements tragiques ont permis de montrer les deux visages de la France, symbolisés par les intellectuels : ceux qui se rangèrent dans le camp  des collaborateurs ( Drieu la Rochelle, Paul Morand, Brasillac, Céline, Maurras...) et ceux - heureusement beaucoup plus nombreux) qui choisirent la Résistance (Jean Cassou, Pierre Emmanuel, Michel Leiris, Loÿs Masson, Aragon, Eluard, Jean Tardieu, Max-Paul Fouchet, Stéphane Hessel...)

Soixante-dix ans plus tard, le contexte n’est plus le même ; la menace la plus forte vient d’une société globalisée qui tarde à reconnaître ses erreurs et freine le changement ; et on entend peu les intellectuels dans les combats contre les périls d’aujourd’hui ( le dérèglement climatique, le racisme, la pauvreté).

On attend un réveil des intellectuels. Il ne s’agit plus aujourd’hui de rêver de lendemains enchantés ; il s'agit d'affronter avec lucidité la réalité pour éviter le pire.

mardi 19 mai 2015

Quatre idées familières (900e)

u temps présent ».



Quatre idées familières

Il m’arrive  parfois de critiquer les nouvelles technologies ; je dois  cependant leur reconnaître un intérêt certain.
Il y a quarante ans, quand  on  publiait dans une revue un poème ou une chronique, on l’abandonnait aux lecteurs sans savoir, la plupart du temps, comment l'écrit serait perçu.
Aujourd’hui, grâce à la technologie, toutes les statistiques qui peuvent intéresser l’auteur d’un blog sont à sa disposition.
C’est ainsi que j’ai été informé que ce billet était le 900e de la Rumeur du temps. J’ai aussi appris quels étaient les choix des lecteurs. Les billets les plus lus sont donc :
1. Information et écologie
2. Poésie du langage populaire
3. Les bergers ( poème en prose)
4. Les tournesols - variations n° 2 ( art et poésie)

Si le choix de l’écologie ne m’étonne pas, en raison de l’importance que celle-ci a prise en cette période cruciale pour l’avenir de l’humanité, c’est une agréable surprise pour moi de constater la bonne place occupée par la poésie.

La poésie, cet art que les médias traditionnels ont abandonné depuis longtemps, est un mode d’expression, une rencontre, qui est au centre de mes activités.

Albert Camus  écrivait dans Noces : « On vit avec quelques idées familières. Deux ou trois ».
À‭ l’occasion de la sortie de son dernier livre‬ Pour que tu ne te perdes pas dans le quartier, on a reproché à Modiano d’écrire toujours le même livre.
Il y a une part de vérité dans ce deux remarques.

Chaque auteur a ses thèmes préférés ; il peut les traiter des dizaines de fois, là n’est pas le problème. L’essentiel pour lui est de ne pas lasser le lecteur. Pour cela il doit se renouveler sans cesse, afin de le surprendre toujours,  en choisissant de nouveaux angles, en explorant la complexité des choses et des sentiments.
Cette démarche est  aussi celle qu’on utilise dans l’enseignement. Prenons l’exemple d’une matière, l’ histoire. De l’école primaire à l’université, on va rencontrer les mêmes personnages, les mêmes évènements ; à chaque étape, on approfondit le sujet,  on va de plus en plus loin dans la complexité.

Si je suis la pensée de Camus, les quelques idées  familières qui m’accompagnent depuis toujours sont au nombre de quatre :
- la  poésie est essentielle à l’Homme
- on a besoin de  la nature

« Ecoute, Bûcheron, arrête un peu le bras !
Ce ne sont pas des bois que tu jettes à bas :
Ne vois-tu pas le sang, lequel dégoutte à force
Des nymphes qui vivaient dessous la dure écorce ?»
( Ronsard - extrait de Contre les bûcherons de la forêt de Gatine)
Dès l’école primaire, à une époque on le mot écologie n’était pas popularisé, c’est par le biais de la poésie que j’ai pris conscience de ce qu’on devait à la nature. Ronsard, et plus tard Richepin, Guillevic, et bien d’autres, ont montré la nécessité pour l'homme d'une osmose avec  la nature.
En rendant hommage  à mon tour à celle-ci, je me suis engagé en toute logique dans le combat pour l’écologie.
Quand ils  marchent au cœur de la nature, les poètes
« puisent  leur  force
dans le vent et la pluie,
dans  le chant des étoiles,
écoutent les histoires     
que leur  content les arbres.» ( Les marcheurs)
Et leur imagination leur permet de sortir de la monotonie et des inquiétudes du quotidien.
La poésie née de la contemplation de la nature et tournée vers les autres devient un art de vivre :               
« Il suffit d’un  chemin 
au bord du ruisseau qui flâne 
entre les arbres 
avant de rejoindre la rivière 
pour  deviner la mer 
et aller au bout du monde.»


samedi 16 mai 2015

HUMEURS n° 5 : Pesticides, l'aberration

« Ça ne fait rien, nous vivons un temps bien singulier ” 
( Georges Brassens - L’épave)
Les billets regroupés dans cette catégorie illustrent cette sentence qui n’a pas pris une ride depuis 1966

PESTICIDES : L’aberration



Tout le monde aujourd’hui connaît les dangers des  produits chimiques - pesticides, insecticides, herbicides, fongicides... - utilisés en agriculture intensive pour améliorer les récoltes. 
On nous fait croire que ceux-ci sont indispensables alors que les agriculteurs bio démontrent chaque jour que les méthodes naturelles permettent de s’en passer.
Si la fondation Nicolas Hulot fait circuler actuellement une pétition (1) pour interdire les pesticides, c’est parce que ceux-ci  contribuent, de manière dramatique à la disparition des abeilles. Or ce sont les insectes pollinisateurs qui, en transportant le pollen, assurent la reproduction de la plupart des fruits et des légumes que nous mangeons.
Les pesticides polluent  les écosystèmes, notamment les milieux aquatiques, et nuisent à la santé.
Trois  millions de personnes sont intoxiqués par eux  chaque année  et selon l’OMS, ils causent la mort de  milliers de personnes, surtout dans les pays en développement (2)

Quant aux  insecticides, ils  font partie de la famille des pesticides. Comme leur nom l’indique, ils sont destinés à détruire les insectes, leurs larves, leurs œufs, ainsi que les arthropodes.

Pour comprendre pourquoi le combat des associations écologistes  contre les pesticides est difficile, il suffit de savoir que cette  industrie  représente aujourd’hui un marché estimé à environ 40 milliards de dollars dans le monde ! (3)

La loi du marché doit-elle s’imposer quand la santé des personnes et la biodiversité sont en cause ?
La logique voudrait qu’on réponde non.
Pourtant, dans un pays comme la France, on n’hésite pas à franchir les frontières de l’aberration en poursuivant des vignerons bio «coupables» d’avoir refusé de traiter leurs vignes avec des insecticides chimiques.
Après Emmanuel Giboulot  ( qui a été relaxé en 2014 après avoir prouvé que l’arrêté préfectoral imposant le traitement par insecticide n’était pas légal ) c’est un vigneron du Beaujolais, Thibaut Liger-Belair, qui est convoqué au tribunal correctionnel le 19 mai, pour avoir refusé  de lutter contre   la flavescence dorée , cette maladie de la vigne due à une petite bactérie, en utilisant un insecticide chimique. 

Vouloir imposer des produits dangereux quand la logique voudrait qu’on s’en passe ! Oui,  « nous vivons un temps bien singulier». 

2. source : planetoscope.com
3  source : idem

COMMENTAIRE

20 mai 2015 : J'apprends ce matin que Thibaut Liger-Belair, qui comparaissait devant le tribunal de Villefranche-sur-Saône a été relaxé.

mardi 12 mai 2015

Carnet de Bord : 10 mai

Le Carnet de Bord livre chaque semaine des réflexions sur notre époque, inspirées par mes activités, mes loisirs, mes sorties et l'actualité. Ces libres cheminements ont pour but  de faire entendre « la rumeur du temps présent ».


Sur mon carnet de bord, j’ai noté cette semaine :
Vendredi 8 mai : La commémoration de la capitulation de l’Allemagne, le 8 mai 1945, semble de moins en moins suivie par les populations. Peut-être faudrait-il rendre hommage autrement aux victimes du nazisme ?
Samedi 9 : Journée à Paris. Plaisir des voyages en train et des repas en famille.
Dimanche 10 mai : belle journée de printemps ; je pense au 10 mai 1981 (à développer)
lundi 11 : La télé rend hommage à Renaud, silencieux depuis plusieurs années. L’inspiration n’est peut-être plus là mais il nous reste  ses superbes chansons;  

10 mai
Dimanche 10 mai. Enfin les beaux jours sont revenus. Cet après-midi, le monde se pressait vers les plages de sable de la Côte d’Opale. Entre Hardelot, la station bourgeoise lancée en 1905 par un mécène anglais, John Whitley,  et Le Touquet la mondaine, créée quelques années plus tôt par le même personnage, se trouve Sainte-Cécile, une jolie station plus modeste. C’est là que nous goûtons souvent, ma femme et moi, le plaisir toujours renouvelé, des promenades au bord de la mer.

Et au retour, assis dans le jardin, dans les odeurs du lilas refleuri,c’est l’heure où je laisse vagabonder l’esprit, où mûrit la prochaine chronique ( celle que vous avez sous les yeux).


Le 10 mai 1981 est fixé dans la mémoire collective. Pour les uns, c’était l’annonce d’un cataclysme, la crainte irrationnelle de voir les chars russes entrer dans Paris. Certains  étaient même prêts à s’exiler ! 
Pour le peuple de gauche, c’était le moment attendu depuis tant d’années. Pour ceux de ma génération qui avaient connu la fin peu glorieuse de la  IVe République, le retour soigneusement préparé de De Gaulle, les utopies sans lendemain de mai 68, la France ronronnante de Pompidou et celle plus moderne - mais seulement dans la forme -  de Giscard, l’élection de François Mitterrand représentait l’espoir d’un changement. Des signes furent rapidement donnés ; la création des radios libres, la suppression de la peine de mort, la place accordée à la culture furent de réelles avancées.
La suite ne fut pas à la hauteur des espérances et des révélations sur le passé du Président, les amitiés embarrassantes, la nomination au gouvernement d’un homme d’affaires contesté troublèrent les électeurs.

Dans la soirée de dimanche, la Chaîne parlementaire est revenue sur cette période.
Avec le recul du temps, les images parlent davantage et sont parfois cruelles.
Nous avons revu les acteurs pleins de fougue des années Mitterrand, ces jeunes qui fondèrent SOS Racisme. On les voyait, Harlem Désir en tête,  remplis d’enthousiasme, lutter pour une belle cause. Mais déjà, pointaient les ambitions personnelles...
Cette gauche avait choisi la belle expression de Rimbaud « Changer la vie ». Formule de poète que la politique politicienne n'a pu mettre en pratique.

On a revu   les visages aujourd’hui bien connus de ces énarques  qui étaient dans l’entourage du président. Beaucoup sont devenus ministres, certains le sont encore ; l’un d’eux est l'actuel président de la République.
Ces cadres, ces élites, ont oublié d’écouter le peuple qui leur faisait confiance  et le peuple déçu s’est éloigné d’eux, allant chercher ailleurs d’autres sources d’espoir, parfois sans issue. 

Au milieu des années 60, pendant plusieurs étés, j’ai dirigé des stages franco-africains dans le Tarn, à Graulhet, Lacaune, Carmaux... Nous étudions sur le terrain les mutations économiques d’un secteur et cherchions des solutions pour le futur. C’est à cette occasion que j’ai rencontré des personnes âgées qui avaient connu Jaurès. Ces gens avaient été ouvriers, petits paysans, postiers, instituteurs...Certains l’avaient entendu parler, tous avaient lu ses écrits et partageaient ses idées.
Ils avaient déjà le sentiment que ces idées avaient tendance à être dénaturées.

Alors, en ce 10 mai 2015, j’ai pensé :
-  Que diraient-ils aujourd’hui ?


Commentaires :

Ramon Ciuret : Souvenirs, souvenirs... 

dimanche 10 mai 2015

Humeurs n°4 : la grande muette

« Ça ne fait rien, nous vivons un temps bien singulier ” 
( Georges Brassens - L’épave)

Les billets regroupés dans cette catégorie illustrent cette sentence qui n’a pas pris une ride depuis 1966



La grande muette, parlons-en

J’entends des partisans de l’ordre et de l’autorité absolue ( celle qui n’admet pas la discussion) réclamer le retour du service militaire.
Leur principal argument est de dire que celui-ci avait l’avantage de réunir toute une classe d’âge, de toutes conditions sociales.

 À‭ ‬ cela on peut répondre qu’il existe déjà d’autres moyens de permettre la mixité sociale : l’école publique, de la maternelle au collège, n’est-elle pas le lieu où se retrouvent des enfants de tous milieux ?  Encore faudrait-il  que certains parents plutôt aisés,  peu enchantés de voir  leur progéniture  côtoyer des enfants du « peuple »,  respectent la carte scolaire.

D’autres lieux permettent aussi la rencontre de milieux différents, en particulier les clubs sportifs dans lesquels on pratique une discipline populaire : le football, le basket, l’athlétisme, le judo, et bien d’autres...

Une autre raison me pousse à ne pas souhaiter le retour du service militaire obligatoire : c’est la conception de l’éducation qui y était donnée.
Mon expérience en la matière est très limitée ; je n’ai connu que  trois jours de  vie en caserne, ceux qui précédaient l’incorporation. Ils ont suffi pour me donner une idée  de la discipline militaire qui ne me convient pas. Pour moi, l’individu est d’abord un citoyen que la hiérarchie respecte et non un exécutant docile.

Et puis, il y a cette pédagogie qui relève parfois du gag et qu’exprime très bien cette question extraite des règlements d’infanterie d’autrefois :
- De quoi sont les pieds ?
Cette phrase est étonnante dans sa construction. Elle interpelle celui qui l’entend ou la lit.
Mais son but  n’est pas de faire travailler l’imagination, puisque ce règlement doit être appris par cœur.
La réponse tombe, inattendue, cocasse : 
- « Les pieds sont l’objet de soins attentifs ».

Une méthode qui donne envie de préférer l’école, malgré les défauts que celle-ci peut avoir !


Commentaires:
Lisiane Albrecht :
La mémoire fait qu'on efface les mauvais souvenirs,.une sorte de nostalgie d'une époque rêvée où tous les hommes de tous les milieux se retrouvaient tous au service militaire pour servir la mère patrie. Sauf que tous les hommes n'y allaient pas: connaitre un colonel aidait bien , soit pour se faire dispenser où avoir une destination choisie . Selon le niveau d'étude nos jeunes étaient soit seconde latte où officier ..je ne pense pas qu'ils vivaient du coup la même chose. Et surtout la démocratie s'arrêtait à la porte des casernes... 

jeudi 7 mai 2015

Éléphants

Éléphants
Défense d'une espèce en danger


L'éléphant et l'art : en haut, éléphant d'Asie sculpté dans le
bois; ci-dessous, éléphant en bronze


Lorsque j’étais enfant, comme beaucoup de jeunes, certains animaux vivant dans des contrées lointaines, me fascinaient : l’éléphant, la girafe au cou démesuré, le lion majestueux, le chimpanzé au regard profond.
L’éléphant était celui qui m’impressionnait le plus, non seulement à cause de sa taille - plus de trois mètres au garrot - et de son poids ( à 7 ou 8 ans, on a du mal à apprécier ce que représente une masse de 5 à  6 tonnes)  mais aussi à cause de cette trompe curieuse qui faisait sa particularité.

Je n’ai jamais imaginé un éléphant heureux ailleurs que dans la savane ou la forêt.
Le spectacle de l’éléphant qu'on dresse pour le cirque et qu’on oblige à faire des gestes contraires à sa nature pour plaire à un public m’a toujours offusqué.

J’appris plus tard que l'éléphant a une très bonne mémoire et que son intelligence peut être comparée à celle des hominidés ( il a conscience de lui-même), qu’il est aussi un symbole de sagesse dans la culture asiatique, ce qui n’est pas étonnant : on imagine pas ce mammifère imposant s’agiter de colère ; il représente  la force tranquille.

Leconte de Lisle est sans doute celui qui a su parler le mieux de cet animal.
Dans un long poème intitulé Les éléphants il décrit la longue marche d’un troupeau à travers le désert :

« Celui qui tient la tête est un vieux chef. Son corps
Est gercé comme un tronc que le temps ronge et mine
Sa tête est comme un roc, et l'arc de son échine
Se voûte puissamment à ses moindres efforts. 

Sans ralentir jamais et sans hâter sa marche,
Il guide au but certain ses compagnons poudreux ;
Et, creusant par derrière un sillon sablonneux,
Les pèlerins massifs suivent leur patriarche.
....
Mais qu'importent la soif et la mouche vorace,
Et le soleil cuisant leur dos noir et plissé ? 
Ils rêvent en marchant du pays délaissé,
Des forêts de figuiers où s'abrita leur race.
....
Aussi, pleins de courage et de lenteur, ils passent
Comme une ligne noire, au sable illimité ; 
Et le désert reprend son immobilité
Quand les lourds voyageurs à l'horizon s'effacent.»

Hélas ces animaux splendides qui étaient si nombreux autrefois dans la savane et les forêts africaines, ainsi qu’en Asie ( au début des années 70, on en comptait plusieurs millions) sont menacés d’extinction, certains dès 2025.
Leur ennemi principal : l’homme.
Selon le WWF, plus de 12 000 éléphants sont tués chaque année pour répondre à la demande de  marchés illégaux. 120 tonnes d’ivoire sont vendues  à l’Asie tous les ans.
Le braconnage est une autre menace ; il a pour but de vendre leur viande et  leur peau.
Enfin la perte de certains habitats, fragmentés et détruits par l’homme, contribue à la diminution de l’espèce.

Le rôle de la biodiversité est encore mal compris de nos jours.
La disparition des éléphants serait une catastrophe à laquelle il ne faut pas se résigner.

mardi 5 mai 2015

Carnet de bord : Une jupe trop longue

Le Carnet de Bord livre chaque semaine des réflexions sur notre époque, inspirées par mes activités, mes loisirs, mes sorties et l'actualité. Ces libres cheminements ont pour but de faire entendre « la rumeur du temps présent ».



Sur mon carnet de bord, j’ai noté cette semaine :
jeudi 30 avril : La radio annonce la mort de Patachou. Les jeunes générations ne la connaissent peut-être pas. Pour la mienne, elle représente la chanson populaire de qualité. Et bien sûr, on n’oubliera pas qu’elle a donné sa chance à Brassens. 
vendredi 1er mai : La fête du travail se déroule dans une ambiance morose ; et l’on est triste de voir - une fois encore - à cette occasion la désunion des syndicats.
samedi 2 : Au nom de la laïcité, on dit et on écrit n’importe quoi. Cela devient insupportable.
(Je développe ci-dessous)
dimanche 3 : Visite de la Cité internationale de la dentelle  et de la mode à Calais. On y croise beaucoup de monde. Conserver la mémoire des savoir-faire techniques est l’une des missions de l’action culturelle.

UNE JUPE TROP LONGUE

Avant d’émettre un avis sur l’épisode de cette jeune fille à qui on a reproché de porter une jupe trop longue pour se rendre au collège, je tiens à préciser mon attachement fort au principe de laïcité que j’ai servi tout au long de ma carrière d’enseignant.

A l’heure où certains politiques et essayistes s’emparent de la laïcité pour la détourner à des fins contraires à ce qu’elle est réellement, je pense nécessaire de rappeler ce qu’elle est.
Et pour cela, il suffit de retourner aux sources, celles qu’on nous enseignait lors de nos études dans les écoles normales : la lettre de Jules Ferry aux instituteurs :
« La loi du 28 mars (1882) se caractérise par deux dispositions qui se complètent sans se contredire : d’une part, elle met en dehors du programme obligatoire l’enseignement de tout dogme particulier ; d’autre part, elle y place au premier rang l’enseignement moral et civique. L’instruction religieuse appartient aux familles et à l’Église, l’instruction morale à l’école. Le législateur n’a donc pas entendu faire une œuvre purement négative. Sans doute il a eu pour premier objet de séparer l’école de l’Église, d’assurer la liberté de conscience et des maîtres et des élèves, de distinguer enfin deux domaines trop longtemps confondus : celui des croyances, qui sont personnelles, libres et variables, et celui des connaissances, qui sont communes et indispensables à tous, de l’aveu de tous.»

La seconde partie de la lettre de Jules Ferry insistait sur l’importance de la   morale :
« Mais il y a autre chose dans la loi du 28 mars : elle affirme la volonté de fonder chez nous une éducation nationale, et de la fonder sur des notions du devoir et du droit que le législateur n’hésite pas à inscrire au nombre des premières vérités que nul ne peut ignorer. Pour cette partie capitale de l’éducation, c’est sur vous, Monsieur, que les pouvoirs publics ont compté. En vous dispensant de l’enseignement religieux, on n’a pas songé à vous décharger de l’enseignement moral ; c’eût été vous enlever ce qui fait la dignité de votre profession. Au contraire, il a paru tout naturel que l’instituteur, en même temps qu’il apprend aux enfants à lire et à écrire, leur enseigne aussi ces règles élémentaires de la vie morale qui ne sont pas moins universellement acceptées que celles du langage ou du calcul ».

Dans cette perspective de la laïcité, la morale - enseignée essentiellement par l’exemple - apprend aux jeunes à vivre ensemble, à respecter les autres, à avoir un comportement responsable.

Les lois qui ont défini la laïcité, notamment celle de 1905, ont précisé les principes énoncés par Jules Ferry. Elles ont garanti la liberté de conscience et de culte, ainsi que l’indépendance de la société civile à l’égard des institutions religieuses.
Ces lois ont été votées à une époque où le catholicisme dominait largement en France. Depuis quelques décennies, la religion musulmane a pris une place plus importante mais reste très minoritaire. Ce qui n’a pas empêché certains politiques et intellectuels de tous bords et certaines féministes, de combattre au nom de la laïcité, et en n’hésitant pas à utiliser parfois le mensonge, ce qu’ils considéraient comme une menace.

Ce qui s’est produit récemment dans un collège des Ardennes est la preuve d’un sectarisme contre-productif  : une jeune musulmane de 15 ans  a été interdite de cours à deux reprises dans son collège. La principale  lui reprochait de porter une jupe qui était  jugée  trop longue. La ministre de l’Education a fait connaître sa position : pour elle, la direction de l’établissement a fait preuve de discernement en prenant cette décision.

Cette jupe de couleur noire ( cela a été précisé !) a donc été considérée comme un «  signe ostentatoire d’appartenance religieuse » à cause de sa longueur. 
J’y vois plutôt un signe vexatoire pour la jeune fille, une attitude qui ne reflète pas l'esprit de la laïcité.

samedi 2 mai 2015

HUMEURS n° 3 : Caractères d'une époque

Caractères d’une époque (la nôtre)

« Ça ne fait rien, nous vivons un temps bien singulier ” 
( Georges Brassens - L’épave)

n°3

Deuxième partie

En entamant la deuxième partie de cette chronique, une chanson de Jacques Brel, écrite au début de sa carrière, me revient à l’esprit. Il s’agit de “ Il nous faut regarder”. Brel avait alors  une vision optimiste du monde. Il nous invitait  à voir “derrière la saleté / s'étalant devant nous..." tout « ce  qu’il y a de beau». 
C’est un peu la démarche que je suis dans cette chronique, sauf que je vais dans le sens inverse. Après avoir décrit la beauté de la nature un matin de printemps et évoqué les « belles personnes » qui enchantent la société, je propose de regarder ce qu’il y a de laid dans ce monde incertain qui n’a pas encore dit clairement quel avenir il voulait.

Je sais que certaines personnes n’aiment pas voir le mauvais côté des choses et des hommes. Elles pensent qu’il faut avoir - sur tous les sujets - une vision positive, une façon pour elles de rassurer les gens et de se rassurer elles-mêmes.
Je pense le contraire : ne pas regarder la vérité en face n’est pas la bonne méthode.
Il faut avoir le courage d’agir si l’on veut éviter que les dérives s’amplifient et conduisent à l’horreur, comme ce fut parfois le cas dans le passé.
En effet, dans un monde qui a perdu ses repères et qui est confronté à de multiples problèmes touchant l’humanité entière (nul n’est à l’abri de la crise écologique, qu’il soit riche ou pauvre), la haine représente le plus grand des dangers car elle menace la paix, elle détourne des vrais problèmes ( sociaux, écologiques),  elle conduit au mensonge ( mentir pour accabler l’autre), elle sème la peur.
La haine entraîne le mépris de l’autre, le dédain, la brutalité, le cynisme. Pour atteindre son but, le haineux n’a aucun scrupule ; tous les moyens sont bons pour atteindre son but.




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