Les vœux
présidentiels
À
la locution langue de bois on associe souvent le mot politicien. Ce
n’est pas étonnant, le Robert définit ainsi l’expression : « discours
figé, stéréotypé (notamment du pouvoir politique) ».
L’honnêteté
m’oblige à dire que les politiques ne sont pas les seuls à
utiliser un langage qui manque de sincérité, mais lorsqu’il
s’agit de responsables politiques – surtout de ceux qui sont à
la tête d’un pays – on est en droit d’attendre autre chose que
ce qui s’apparente à une propagande mensongère.
Martine
Chosson a écrit sur ce thème un livre très plaisant, Parlez-vous
la langue de bois ? (dans le collection Le goût des mots).
Elle y consacre un chapitre consacré aux politiques et notamment à
l’exercice des vœux adressés en fin d’année par les présidents
de la République.
Bien
sûr, concède-t-elle, la période choisie pour ces allocutions
présidentielles – à quelques heures du réveillon du 31 décembre
– n’est pas la meilleure pour adresser un message qui risquerait
de troubler la fête. Mais rien n'oblige les présidents à perpétuer l'exercice sous cette forme.
*
C’est
Charles de Gaulle qui prit le premier l’initiative de ce discours
de fin d’année, en 1960. Jusqu’en 1968, il parla à maintes
reprises de confiance et de sérénité. La crise était déjà
présente dans son esprit :
« Les
temps sont troublés » déclarait-il, mais il fallait rassurer les
citoyens : Les
Français peuvent être tranquilles, la France va bien, disait-il en substance. Chez de Gaulle, la langue de bois
avait au moins un mérite : son lyrisme ne lassait pas le
téléspectateur.
Georges
Pompidou aimait la poésie, mais son style était très banal :
« L’hiver
est là, il fait froid » et bientôt viendrait le printemps. On attendait mieux d'un littéraire. Comme son prédécesseur, il rappelait aux gens la chance d’être
Français :
« Nous
ne sommes pas les plus riches mais nous sommes les plus heureux... »
Valéry
Giscard d’Estaing tentait lui aussi de mettre une touche poétique
dans son discours, mais le résultat était plutôt affligeant.
Avec
François Mitterrand, le style était différent ; c’était
plus précis et des chiffres étaient cités. Mais l’envie de
rassurer en embellissant la réalité était toujours là.
Il nous disait « ...Nous
abordons 1986 dans la meilleure situation que nous avons connue
depuis 18 ans. »
Bien sûr, il y avait eu des avancées
sociales, mais le chômage ne cessait de croître et la crise
écologique s'amplifiait et il la passait sous silence.
Les
présidents suivants ont maintenu l’intervention de la
Saint-Sylvestre en fidèles adeptes de la langue de bois. Ils ont mis en avant leur action et laissé de côté
ce qui pouvait les gêner. Ceux qui les écoutent encore ne sont pas
dupes : la vérité, ils la connaissent, c’est ce qu’ils vivent au quotidien.
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