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lundi 9 janvier 2012

Un étonnant coup d'état (fin)


Un an plus tard

( Ceci est la suite des billets du 19 décembre  et du 30 décembre 2011)



Albéric Lenouard avait passé deux semaines à Santa Rosa. Le souffle nouveau de liberté y était visible et on sentait les gens heureux. Il n’y avait eu aucun débordement dans le pays. La seule question qui aurait pu diviser la population — Que faut-il faire du dictateur déchu ? — s’était résolue simplement : le vieil homme pris de panique avait tenté de se réfugier dans une île qu’il possédait. Son bateau, pris dans une forte tempête, s’était fracassé sur les rochers et le dictateur s’était noyé.
Le 23 décembre 2042,  jour anniversaire du début de la révolution des rubans ( c’est ainsi que la presse l’avait nommée), Albéric était de retour  à Santa Rosa pour observer la situation du pays.
Dès son arrivée, il fut frappé par la métamorphose du paysage. L’air lui parut plus doux à respirer. On lui expliqua qu’un plan d’urgence avait été établi. Il prévoyait la plantation de millions  de lapachos, de cerisiers, de pommiers, d’hévéas. Phénomène contraire à ce qui s’était passé en Europe deux siècles plus tôt, on voyait les gens quitter les villes inhumaines, les usines tristes, les bureaux sinistres, pour venir s’installer à la campagne. Beaucoup  de gens travaillaient chez eux et cultivaient un coin de terre. Ce mouvement avait entraîné une énorme chute des ventes dans les immenses magasins  qui bientôt seraient  condamnés à fermer. Ce n’était pas dramatique, bien au contraire. Les gens faisaient désormais leurs courses près de chez eux et les petits magasins où l’on trouvait les produits de la région florissaient.
Mais ce qui étonna le plus Albéric, ce fut la réforme de l’école, un élément essentiel de la nouvelle politique, selon Diego, un jeune professeur qui  lui en parla avec enthousiasme :
 — Dans l’ancien régime, expliqua-t-il, l’enseignement était au service des pouvoirs qui étaient tous détenus par le dictateur et  sa famille. On apprenait aux élèves comment devenir de bons soldats, de bons consommateurs, des  travailleurs qui exécutent les tâches le plus vite possible et sans rechigner. Les plus riches réussissaient leurs examens, les autres occupaient des postes subalternes ou ne trouvaient pas de travail.
Avec la réforme, les notes ont été supprimées et les examens qui sont des machines à exclure ont disparu. Tout le monde aura les mêmes chances, chacun pourra voir son projet de vie aboutir. Les enseignants ne participeront plus à la sélection des élèves, ils les aideront à découvrir ce qu’est la vraie vie : le chant, la poésie, la danse, l‘amitié, l‘amour des gens et de la nature…
Albéric écoutait le jeune professeur avec ravissement. 
— Ainsi, pensait-il, les utopies auxquelles je croyais dans ma jeunesse sont en train de se réaliser ! Je n’y croyais pas trop, même si je l’espérais.
Et il se mettait à rêver de voir prochainement le reste du monde  s’inspirer de cette révolution douce.



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