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vendredi 29 mars 2013

Les minorités : deuxième partie



Minorités et innovation sociale

Après avoir évoqué dans la première partie le fait minoritaire sous l'angle des libertés et de la démocratie, abordons aujourd'hui la question du point de vue de l'innovation sociale.

« Une société sans minorités actives et déviantes est une chose aussi impossible et irréalisable qu'un carré rond ».
Serge Moscovici

Moscovici qui est une référence en matière de psychologie sociale désigne sous l'appellation « minorité active » un groupe qui réfléchit et agit de manière organisée pour proposer des solutions nouvelles appelées à remplacer un jour les idées portées par la majorité du moment.
La majorité active se distingue de la « minorité déviante » qui se contente souvent de contester ou transgresser les règles existantes sans proposer de solutions constructives. Mais il arrive parfois que les deux se rejoignent, notamment lorsque les circonstances sont exceptionnelles : ce fut le cas pour la  la Résistance qui apparut à l'époque comme un mouvement  déviant puisque ses membres refusaient les règles imposées par le régime de Vichy afin de défendre la liberté du peuple français. Par le suite, l'Histoire a rétabli la vérité : la déviance n'était pas du côté des résistants.

Dans des circonstances « normales », la minorité active ne cherche pas le conflit ; ce qui compte le plus, selon Serge Moscovici, c'est d'exercer une influence et lorsqu'un désaccord existe avec la majorité, il faut chercher à l'apaiser tout en refusant le compromis qui dénaturerait les idées de la minorité.
Les minorités actives sont indispensables à la société car elles produisent de l'innovation, elles inventent de nouvelles manières d'étudier les problèmes.
En effet toute majorité est confrontée au risque de l'enlisement dans la routine, à la difficulté d'anticiper les changements qui l'amène     à suivre des principes qui ont peut-être été justes dans le passé mais que la connaissance scientifique ou la réalité des faits a démentis.

Pourtant, lentement, les idées portées par les minorités actives finissent souvent par être reprises. On peut citer dans les dernières décennies le cas des idées portées par les féministes et les écologistes. Dans de nombreux pays les idées qu'ils ont portées pendant des décennies ont fini par être entendues par les citoyens et partiellement intégrées par les gouvernements.
Mais dans ce processus la force des idées minoritaires s'appauvrit et  l'évolution permanente de la société conduit à faire émerger de nouvelles minorités.



mercredi 27 mars 2013

Réenchantement : Un mot, une question n° 7


Un mot : réenchantement
Une question : Quel lien entre le réenchantement et la convivialité ?

« Conviviale est la société où l'homme contrôle l'outil. »
( Ivan Illich – La convivialité 1973)



Le désenchantement du monde que Max Weber liait déjà au début du 20e siècle au système économique dominant s'est amplifié à partir des années 60.
Réenchanter l'être humain est un processus qui concerne tout le monde et qu'il ne faut pas confondre avec la joie de vivre d'une poignée de privilégiés ; ce n'est pas non plus une démarche réservée aux seuls intellectuels.
Réenchanter l'homme c'est considérer celui-ci dans toutes les facettes de sa personnalité, c'est lui offrir les conditions favorables à son épanouissement, à sa créativité, lui rendre sa dimension poétique.
L'homme libéré est multidimensionnel.

Réenchanter le monde, c'est aussi poser la question du rapport entre l'homme et la nature.
Mais la nature dont il s'agit ici n'est pas limitée au monde physique dans lequel l'homme vit ; elle est, comme l'a écrit Serge Moscovici, « une nature historique à laquelle nous donnons un état différent à chaque ère de l'histoire , (elle  ) est pour nous l'idée qui comprend tous les chemins possibles, dans le temps, entre le hasard et la nécessité contraignante ».
La nature est encore, comme l'a formulé Dominique Simonnet dans son livre L'écologisme (Que sais-je? PUF) « le milieu personnel, la nature de l'individualité humaine, la conscience que chacun a de soi »

Le réenchantement de l'être humain est-il possible dans un monde qui s'est affranchi des règles morales, dans une société qui ne respecte pas les hommes et le milieu dans lequel ils vivent, une société dans laquelle une infime minorité s'accapare une grande part des richesses et cherche à imposer sa logique destructrice, celle qui réduit l'individu au statut de producteur /consommateur et qui met en péril le patrimoine naturel appartenant à tous (l'air, l'eau, les forêts...) ?
Evidemment non. Et le chemin pour y parvenir risque d'être long.

Il passera d'abord par la prise de conscience du conditionnement dans lequel beaucoup de gens sont enfermés, par le refus de cet enfermement et la volonté de vivre autrement, en préférant les joies simples aux illusions de la possession, l'authenticité à l'artifice, le partage et l'échange au repli sur soi.

Réenchanter l'être humain demande un changement profond de la société ; ce sera l'un des objectifs de la société conviviale.



lundi 25 mars 2013

Les minorités ( première partie)




Le fait minoritaire peut être vu sous différents angles. Je limiterai aujourd'hui la réflexion à deux aspects : les minorités du point de vue des libertés et de la démocratie, les minorités "actives" et l'innovation sociale.

Qu'il s'agisse du premier ou du deuxième sens, j'ai toujours éprouvé de l'empathie pour les minoritaires, ceux qui sont privés de la liberté de penser, de pratiquer leur religion, de parler la langue de leur région et les autres, ceux qui avancent à contre-courant de la pensée dominante pour faire germer des idées nouvelles.

Dès l'école primaire, les souffrances endurées par les minorités m'ont révolté. C'est ainsi que le récit des persécutions subies sous Louis XIV par les communautés protestantes - lors des dragonnades – m'horrifiait ; la suppression de l'édit de Nantes qui conduisit, en 1685, à l'exil en Hollande ou en Suisse un grand nombre d'entre eux m'était apparu comme un acte ignoble d'intolérance.

Aujourd'hui encore, dans de nombreux pays, les brimades subies par des gens en raison de leur appartenance à une religion minoritaire perdurent. Cela démontre que la croyance religieuse qui devrait se limiter à la sphère privée et être garantie pour tous dans tous les pays est dans la réalité un fait social qui peut être instrumentalisé par des chefs d'état totalitaires ou par des hiérarchies religieuses essayant d'imposer à tous leur vision des choses.

Par ailleurs, dans une démocratie où nul ne devrait être inquiété en raison de ses opinions politiques et philosophiques, l'existence de réseaux extrémistes constitue un danger pour les droits de l'homme : ces réseaux ne cessent d'exprimer leur haine envers ceux qui pratiquent une autre religion que la leur.

D'autres minorités existent, traitées durement dans certains pays : minorités ethniques telles que les Kurdes de Turquie et d'Irak, les Indiens des Etats-Unis, minorités victimes de discrimination à cause de leurs orientations sexuelles...

Sur un autre plan, dans une démocratie comme la France, le sort des minorités politiques n'est pas enviable : en effet le poids qu'elles représentent dans l'électorat est fortement réduit en raison d'un système bipolaire qui amplifie les résultats des grands partis. Il s'agit là d'une injustice : seule la proportionnelle intégrale peut exprimer la réalité de diversité des opinions des citoyens.

Enfin j'évoquerai une autre forme de minorité, celle qui regroupe en France ( d'autres pays sont plus évolués) les végétariens. Certes leur cas paraît moins insoutenable que celui des minorités évoquées plus haut. Il n'en reste pas moins que les personnes qui ont fait ce choix pour des raisons éthiques, écologiques ou personnelles, sont trop souvent l'objet de moqueries et voient leurs idées contrariées dans la vie de tous les jours : en de nombreux lieux ( cantines, réunions de travail...), la liberté de manger selon leurs convictions n'existe pas.

En ce qui concerne le respect des minorités, beaucoup de progrès restent donc à faire.

(À suivre)

vendredi 22 mars 2013

Arbres secs


" Le monde matériel ressemble à un cocon : nous le construisons avec beaucoup d'amour et nous nous y enfermons, oubliant qu'il existe au-dehors des choses bien plus belles "  écrivait Sri Ramakrishna.

PENSEE 



Ainsi trop de gens, pris dès l'enfance dans le piège d'une société dans laquelle posséder compte davantage qu'être, perdent très vite leur pouvoir d'émerveillement, la force créatrice qui était en eux.
Ceux qui ne savent plus s'abandonner à la rêverie me font penser à ces vieux arbres secs des vergers délaissés qui ne donneront plus de fruits. Certains parmi eux mangent peut-être dans des restaurants luxueux, dorment parfois dans des palaces, ont la richesse arrogante. 

Ils ne connaîtront jamais les saveurs de la vraie vie car ils sont morts déjà.


vendredi 15 mars 2013

Transports et transition énergétique




Si l'on veut aborder la question des transports dans la perspective de la transition énergétique, il ne faut pas se contenter de proposer des solutions techniques ( la voiture électrique par exemple) ou le covoiturage, ni même affirmer sa préférence pour les transports collectifs. Ce serait prendre le problème par le petit bout de la lorgnette.
Seule une approche globale de la question peut nous permettre de trouver les solutions les mieux adaptées.
Et cet exercice n'est pas une affaire d'experts, c'est l'affaire des citoyens. Il suffit d'un peu de bon sens et de volonté.
Une bonne politique des transports doit assurer le droit à la mobilité de chacun et l'acheminement des marchandises, en réduisant au maximum l'impact sur l'environnement et en garantissant la justice sociale.
Il faut donc prendre en compte plusieurs paramètres.
Le plus important est d'organiser les territoires ( habitat, commerces, lieux de production) de manière à réduire les déplacements. Cela passe par la remise en cause de l'aménagement du territoire tel qu'il est pratiqué depuis une quarantaine d'années et par une relocalisation de l'économie permettant aux gens d'acheter des produits locaux.
Dans le domaine des transports, les enjeux  sont importants pour l'avenir :
- Enjeux environnementaux : la réduction des pollutions, la lutte contre l'effet de serre, la préservation des ressources et des espaces naturels, réclament une forte réduction de la circulation et en premier lieu celle du nombre des camions et des automobiles.
- Enjeux sociaux : quels que soient leurs revenus, les gens doivent être égaux devant la liberté de se déplacer. Personne ne doit rester captif à cause des  faibles revenus  qui ne lui permettent pas d'acheter de voiture.
- Enjeux économiques : l'investissement dans les transports ferroviaires permet une création d'emplois plus forte que dans le transport routier.
- Enjeux démocratiques : pour tout projet d'infrastructure (comme pour les autres d'ailleurs), il est nécessaire de se poser la question de son utilité sociale et écologique.
C'est la raison pour laquelle la transition sera réussie si elle est portée par les citoyens.

mercredi 13 mars 2013

L'eau, problème mondial


Longtemps l'eau a été considérée comme un bien gratuit appartenant à tous.
Aujourd'hui, elle intéresse les marchands. La bataille de l'eau a commencé.
Autre époque, autres mœurs.
Ne rien dire et laisser faire serait irresponsable.




L'EAU :  UN PROBLEME MAJEUR

Chaque minute, 7 personnes meurent parce qu'elles ont bu une eau polluée.
Dans le monde, 800 millions de gens n'ont pas accès à une eau potable.
En ce début de 21e siècle, l'accès à l'eau potable est devenu une question majeure, au même titre que le réchauffement climatique et l'appauvrissement de la biodiversité.
L'eau, indispensable à la vie, est gaspillée chaque jour par une industrie agroalimentaire qui l'utilise sans compter pour produire légumes, fruits, céréales et viande. L'industrie n'est pas plus économe. 
L'abandon de la gestion et de la distribution de l'eau à des entreprises privées a d'ores  et déjà entraîné de graves  dérives. Alors que l'eau devrait être un bien commun partagé par tous, elle est devenue une source nouvelle de profit, à tel point qu'on la désigne désormais sous l'expression " or bleu". La bataille de l'eau est entamée. Tous les moyens sont mis en  œuvre pour  exporter  l’eau potable ( supertankers, aqueducs, sacs géants,  bouteilles en plastique...) Le temps des pratiques maffieuses est venu.

Depuis un siècle, la demande en eau a été multipliée par sept et la surface des terres irriguées par six. Si l'on veut stopper cette dérive, il faut  à la fois mettre en place un autre développement et  arrêter de laisser au marché le soin de régler la question de l'eau.
Une autre politique  internationale  de l'eau s'impose.
Au niveau européen,  la gestion des réseaux hydrographiques devrait se faire dans un esprit de coopération et de solidarité envers le tiers-monde. Cela suppose que la gestion, la répartition, la distribution de l'eau échappent à la loi du profit. 
Au-delà de la question de l'eau, c'est aussi la sécurité alimentaire qui est en cause.



mercredi 6 mars 2013

Internet : un mot, une question n°3


Un mot : Internet
Une question : Internet est-il un outil écologique 
et convivial ?




Si l'on faisait un sondage sur cette question, il est probable que la majorité des gens interrogés répondraient oui. D'abord parce qu'Internet rend des services indéniables, qu'il permet de limiter les déplacements et de réduire la consommation de papier. Voilà des atouts réels en ce qui concerne l'environnement. Sa facilité d'utilisation en fait un outil convivial dans le sens que lui donnait Ivan Illich ; dans le sens que le mot a plus couramment, on peut dire que les réseaux sociaux, quand ils sont utilisés à bon escient, contribuent à la convivialité.

Mais on ne peut répondre sérieusement à cette question que si on replace Internet dans le cadre global des technologies de l'information et de la communication. C'est ce que fait actuellement une ingénieure du CNRS, Françoise Berthoud. Interrogée récemment par le Monde *, elle expliquait que le travail de son équipe avait pour but d' « éveiller les consciences sur les inconvénients environnementaux » présentés par ces nouvelles technologies.

La recherche entreprise par Françoise Berthoud a l'intérêt d'attirer l'attention sur une question que peu d'utilisateurs se posent. Quels matériaux contiennent les ordinateurs, portables et tablettes ? Quel pourcentage des objets est recyclé, et dans quelles conditions ?
Un autre aspect doit être pris en compte : c'est l'obsolescence programmée de ces appareils qui ne correspond pas à la définition de l'outil convivial. Autre critique qui compte à l'heure où l'on entre dans la période de transition énergétique : le secteur informatique est sans doute celui qui souffre le plus d'une mondialisation poussée à l'extrême, en concentrant sur quelques grands groupes les brevets et les lieux de production. Cela se traduit par des milliers de kilomètres parcourus par tout ordinateur qui sort de l'usine.
Malheureusement il s'agit là d'un domaine où la relocalisation n'est sans doute pas pour demain.

* Le Monde du 2 mars 2013

vendredi 1 mars 2013

15e Printemps des Poètes

LES VOIX DU POEME



Notre société matérialiste, obsédée par la vitesse et la futilité, ne favorise pas l'éclosion de la poésie, souvent oubliée des grands médias. Il faut des initiatives telles que le Printemps des Poètes pour attirer l'attention sur le mode d'expression le plus élaboré de la littérature. 


Malgré leur  manque  de  visibilité  les  poètes continuent   d'exister, poètes connus ou anonymes, qui poursuivent leur route et avancent les mains nues, en poussant leur cri d'alarme ou leur chant d'amour.
Poètes maudits, solitaires, en marge de la société, comme le furent Villon et Rimbaud dans sa jeunesse, poètes reconnus de leur vivant, comme Hugo ou Valéry, Tous ont offert leurs vers à leurs contemporains et aux générations futures.

Un jour, sortant de la mine, Pablo Neruda tendant la main à un ouvrier lui dit : " Il y a longtemps que je te connais, mon frère."
Neruda dont le destin fut de lutter, d'aimer et de chanter, est le symbole du poète qui met son art au service des autres.

Alors quelle poésie pour notre temps?
- D'abord une poésie reflet de notre époque, avec ses moments de bonheur et ses angoisses.
Une poésie forte, débarrassée de sa gangue comme celle de Guillevic. Une poésie qui va chercher la poésie partout où elle est, dans le cageot, la bougie, l'escargot, comme celle de Francis Ponge.
Une poésie qui fait progresser le langage, une poésie visionnaire qui cherche à inventer le futur, comme celle d'André Breton.
Car, ainsi que l'a écrit Alain Jouffroy " les vrais poètes sont ceux qui participent à la transformation du monde." 


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