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mercredi 31 octobre 2012

Philosophie, poésie, politique


Première partie


Où sont les frontières ?

    On a pris l'habitude pendant des siècles de cloisonner les disciplines. Dans la manière de penser, l'introduction de l'écologie a été une véritable révolution car elle propose une autre manière de penser : la vision globale qui donne une perception plus juste des choses, des phénomènes...
Ainsi, quand on met côte à côte, ces trois mots : philosophie, poésie et politique, on sait bien que si chacun de ces termes répond à des définitions précises, il suffit d'un regard sur 2500 ans de vie culturelle et politique pour constater que les frontières entre eux ne sont pas toujours étanches ; dans bien des cas, ils se rejoignent même.
Ainsi Henry-David Thoreau fut à la fois poète et philosophe et s'intéressa de près à la politique, Son ouvrage La désobéissance civile (1849) définit la résistance passive qui inspira Gandhi et Martin Luther King dans leur action,
Jean Jaurès fut d'abord un brillant élève de l'ENS où il croisa Bergson. Après avoir choisi pour thème de sa thèse la réalité du monde sensible, il ne cessa dans son action politique de mettre en pratique des principes moraux : position sur la guerre, rapport entre l'idéal et le réel («  Le courage, c'est d'aller à l'idéal et de comprendre le réel »)
Quant à Victor Hugo, son engagement politique est bien connu : dénonciation de la misère, de la dictature, de la peine de mort

La confiscation

Philosophie, poésie, politique, un fait les unit : la société n'a cessé de les confisquer au profit d'une élite et l'enseignement a une grande part de responsabilité dans cette confiscation.
La philosophie qui nous concerne tous, puisque son but est de nous apprendre à vivre  devrait donc être accessible à tous. Il faudrait pour cela qu'elle soit enseignée autrement. C'est ce que Michel Onfray a compris et qu'il met en pratique depuis des années. Son Université populaire de Caen est un lieu d'échanges féconds où l'on ne vient pas pour ingurgiter la parole d'un professeur mais pour acquérir une autonomie de pensée.

On peut faire le même reproche à l'enseignement officiel de la poésie qui est une désincarnation de celle-ci. La poésie, surtout quand il s'agit d'enfants ou d'adolescents, ne se dissèque pas. il suffit de la lire pour l'apprécier.

La politique intervient dans tous les actes de notre vie quotidienne. Chacun de nous est donc concerné par elle mais quel poids réel avons-nous dans la prise des décisions ?
La démocratie donne aux citoyens les moyens de s'exprimer une fois tous les cinq ou six ans pour désigner leurs représentants. Qui sont  nos dirigeants nationaux et ceux qui les aident dans les cabinets ? Beaucoup ont été formés – et formatés – par  l'ENA ou  d'autres écoles prestigieuses et leur origine sociale ne reflète pas du tout la diversité de la société française.

En ce qui concerne ces trois mots, le changement serait donc : la philosophie, la poésie et la politique pour -et par - tous.



lundi 29 octobre 2012

Les droits de l'animal



Il y a une vingtaine d'années, quand je défendais l'idée que les animaux doivent avoir, en tant qu'êtres vivants, des droits, quand je dénonçais les souffrances subies par les taureaux lors des corridas ou celles des canards et des oies auxquels on impose le supplice du gavage, on me disait souvent que je faisais preuve d' « une sensiblerie exagérée ».
Les choses ont peut-être légèrement évolué depuis 20 ans grâce à la mobilisation des défenseurs des animaux, mais beaucoup reste encore à faire.

Quand on lit des ouvrages se rapportant à l’écologie, que leurs auteurs soient des scientifiques, des philosophes ou des politiques, une chose est frappante : c’est le peu de place accordée aux droits de l’animal.
Les mouvements écologistes s’intéressent peu à la question. S’ils se prononcent pour le respect de la vie, s’ils défendent la biodiversité ( dans un souci d’équilibre écologique), on les entend peu s’exprimer sur les souffrances que l’homme fait subir aux animaux d'élevage et aux animaux sauvages. Certains de leurs leaders défendent même la corrida ou se prononcent en faveur de la chasse au loup.

Dans la période contemporaine, les philosophes, scientifiques et personnalités du monde de la culture, prenant publiquement la défense des animaux sont heureusement de plus en plus nombreux.
Après Théodore Monod, l'homme du désert disparu en 2000, Pascal Picq, auteur notamment d'une Nouvelle histoire de l’Homme, dans laquelle il traite de ce problème,  Hubert Reeves dont on connaît l’engagement au sein du ROC devenu Humanité et Biodiversité, Michel Onfray, le philosophe engagé dans la lutte contre la corrida,et d'autres encore, ont écrit de superbes pages pour rappeler que les animaux sont des êtres sensibles qui connaissent la douleur et le plaisir et qu'à ce titre ils méritent d'avoir  des droits bien définis.

On sait que le comportement humain vis-à-vis de l’animal s’explique par son évolution à travers les siècles. Comme l’a écrit Théodore Monod, « à partir d’un certain degré de puissance l’homme (ne s’est plus senti) une des parties prenantes de la chaîne écologique. » Il s'est cru autorisé à accomplir les actes les plus barbares.
L’esprit de domination, le sentiment de supériorité, colportés par la civilisation occidentale, par les religions monothéistes, par les progrès scientifiques et les thèses de certains philosophes tels que Descartes sévissent depuis des siècles.

L’homme du 21e siècle s’honorerait en révisant sa position vis-à-vis de l’animal et en lui reconnaissant les droits que l’éthique impose. Va-t-on « vers un modèle européen de protection de l'animal ?» s'interroge Le Monde dans son édition du 27 octobre. Plusieurs pays sont sur la bonne voie.
La France restera-t-elle à la traîne en matière de protection animale ? Il faut espérer que non.

Sur le même sujet : Ethique et Animaux


mercredi 24 octobre 2012

Réflexion : Démocratie et tolérance




Il y a quarante ans, séjournant aux Pays-Bas en pleine campagne électorale, je fus surpris de voir, fixées sur les vitres des maisons, les affiches des candidats. Dans certaines rues, on remarquait ainsi une majorité écrasante de portraits représentant la même couleur politique, dans d'autres, les tendances étaient plus équilibrées. Cette pratique offrait l'avantage d'éviter l'affichage sauvage et prouvait que les gens ne craignaient pas de montrer leurs opinions. Elle m'étonna ; je pensais en effet à l'époque ( et encore aujourd'hui) qu'une telle initiative était impossible en France :  certains osant faire la même chose auraient sans doute été victimes de représailles.

Pourquoi évoquer ce souvenir maintenant ? Parce que nous constatons chaque jour des faits consternants qui démontrent que nous vivons  dans une démocratie encore balbutiante.
Au cœur de l'expression démocratique, il y a le débat. Celui-ci doit concerner tous les citoyens et garantir la liberté de parole de toutes les parties concernées. Le débat fécond opposant deux idées ou deux groupes suppose d'abord qu'il ait lieu dans une ambiance sereine, chacun apportant des arguments sincères et vérifiables ; il suppose aussi  que chacun respecte l'autre et, au final, que la décision soit prise en connaissance de cause.

On est loin de ces conditions dans les débats d'aujourd'hui. L'utilisation des nouveaux modes de communication, en particulier à travers les réseaux sociaux, ne fait que renforcer l'idée qu'on se dirige vers une dérive inquiétante. Le recours aux petites phrases tendant à stigmatiser telle partie de la population de la part de responsables politiques, les invectives, les injures, les propos nauséabonds visant des politiques, des journalistes, des minorités, sous la plume ou dans la bouche de militants ou d'anonymes qui se cachent derrière un écran, constituent un grand danger pour la démocratie car ils expriment la haine. Et on sait jusqu'où celle-ci peut entraîner des personnes exaltées.
La démocratie gagnerait à ce que  ces pratiques disparaissent  et que chacun respecte les règles qui permettent de vivre ensemble de manière apaisée.

lundi 22 octobre 2012

Paroles de chat (3)


BORIS



Platon est un chat qui vit depuis dix ans dans une famille composée de Sylvie, une sophrologue, Boris, prof de français, et leurs deux enfants Emma et Jules. ( voir les 2 billets précédents)

Aujourd'hui il nous parle de Boris :

Boris est un homme sympathique. C'est sans aucun doute avec lui que je m'entends le mieux.
Toujours de bonne humeur, détendu, il sait écouter les autres. Je suis sûr que c'est un excellent prof. Avec lui, tous les élèves doivent aimer les cours de français et s'intéresser aux tirades les plus rébarbatives du théâtre du 17e siècle !
Boris et moi, nous nous comprenons bien. Il a sûrement lu la méthode Apprendre le chat en 40 leçons car il comprend le sens de tous mes miaulements ; cela nous permet d'avoir de véritables conversations.

Boris me laisse beaucoup de liberté ; il sait que, malgré l'attachement que je lui porte, j'ai besoin de sortir de mon univers, comme il le fait lui-même. Je ne le cache pas, les jolies chattes de mon quartier ne me laissent pas indifférent.
Je peux aller et venir comme je le souhaite. Il exige seulement que je rentre dès qu'il fait noir. Il m'a expliqué qu'il m'imposait cela pour m'éviter les dangers de la nuit, pour me protéger des attaques de matous jaloux ou intolérants qui n'aiment pas qu'un étranger pénètre sur leur territoire.

Boris est cool. Quand les enfants ont fait une bêtise, il laisse à Sylvie le soin de les réprimander.
Mais peut-être y a -t-il dans cette attitude un peu de lâcheté ?
Moi, je ne lui trouve qu'un défaut : quand il écoute la musique qu'il aime ─ les groupes des années 80 ─ il met la chaîne Hi-Fi à fond et je suis obligé de me réfugier au deuxième étage pour échapper aux décibels qui me font mal aux oreilles. Il devrait pourtant savoir que les chats ont l'ouïe beaucoup plus fine que celle des humains !

vendredi 12 octobre 2012

Paroles de chat (2)




( Dans le billet du 1er octobre, nous avons fait connaissance avec Platon, un chat qui vit depuis dix ans dans une famille composée de Sylvie, une sophrologue, Boris, prof de français, et leurs deux enfants Emma et Jules)

SYLVIE

" Bonjour, c'est moi, Platon, le chat. 
Depuis quelque temps, je trouve Sylvie beaucoup plus énervée que d'habitude. Je me demande si cela ne serait pas lié au fait que Boris s'absente souvent en ce moment pour des raisons que sa femme ne trouve pas très claires.
De toute façon, leurs disputes ne sont pas nouvelles. L'année dernière, par exemple, quand Sylvie est devenue végétarienne, il y eut pendant des semaines des discussions acharnées entre eux. Je me souviens très bien de cet épisode : Sylvie avançait sans cesse ses arguments pour essayer de convaincre son mari. Elle lui expliquait qu'elle ne supportait plus la façon d'élever les animaux, les souffrances qu'on leur faisait subir dans les élevages industriels puis dans les abattoirs. Moi, par solidarité avec mes semblables, j'étais plutôt d'accord avec elle. Boris, de son côté, disait qu'il voulait bien faire un effort mais souhaitait rester libre de manger un steak ou une volaille quand il en avait envie.
Tu feras ce que tu veux, lui avait-elle répondu, mais tu iras acheter ta viande toi-même.
La situation empira quand Sylvie décida de me priver de viande.
Tu es complètement folle, dit Boris ; le chat est un carnivore, tu n'as pas le droit d'aller contre la nature !
Sylvie ne l'avait pas écouté. Pendant plusieurs jours, j'eus droit à une ration de riz et de légumes ; je fus obligé de faire la grève de la faim.
Elle finit par se rendre à l'évidence et j'eus droit à nouveau à ma pâtée habituelle.

Ainsi est Sylvie, une femme qui est gentille avec moi, comme elle l'est avec ses enfants, mais qui s'emporte vite. Je lui pardonne ses colères, ses sautes d'humeur car je sais que la vie de la femme moderne n'est pas facile tous les jours."

( à suivre)

lundi 8 octobre 2012

OGM, bio, climat : pourquoi la vérité dérange




Toutes les contestations qui ont récemment vu le jour au sujet d'études sur des questions relatives à l'écologie (OGM, bio, réchauffement climatique...) montrent le poids des lobbies décidés à empêcher par tous les moyens que s'établisse la vérité scientifique afin de poursuivre leur activité si rentable, quelles qu'en soient les conséquences pour la société.

C'est ainsi que depuis des années se poursuivent les controverses sur la nocivité des OGM pour l'environnement et notre santé. La dernière étude effectuée sous la direction de Gilles-Eric Séralini, professeur de biologie à l'Université de Caen en toute indépendance et avec beaucoup de sérieux ( sur une durée de deux ans) a confirmé les dangers du maïs NK603 de Monsanto.
Aussitôt l'EFSA ( Autorité Européenne de la Sécurité Européenne ) a contesté la qualité de cette étude, ce qui confirme « sa  proximité flagrante avec les industriels » , comme l'a rappelé Greenpeace. De son côté Corinne Lepage a regretté qu'il « était impossible d'avoir accès aux semences » ce qui entrave la connaissance scientifique. En cause, le monopole de Monsanto dans ce domaine.

En ce qui concerne l'agriculture bio, on a droit à la même désinformation. Pourtant il suffit d'un peu de bon sens et d'une lecture des chiffres fournis par des sources sérieuses pour conclure aux avantages évidents du bio sur l'agriculture industrielle : meilleur goût des aliments, risques pour la santé et l'environnement considérablement réduits. Comment peut-on nier encore les conséquences de l'emploi des pesticides, insecticides, fongicides... sur la biodiversité et les coûts supportés par la collectivité pour la dépollution ?

Quant au réchauffement climatique, il continue lui aussi d'être l'objet de controverses de la part d'une minorité de scientifiques particulièrement visible aux Etats-Unis et en Grande-Bretagne. Or l'accélération du phénomène de réchauffement observé ces dernières années ne laisse aucun doute sur le fait que les activités humaines sont en cause.

Pourquoi certains refusent-ils aujourd'hui d'accepter la vérité et – ce qui est plus grave – agissent de tout leur poids pour masquer celle-ci ? La réponse est évidente : ceux qui règnent sur l'économie mondialisée savent que le basculement immédiat vers une agriculture durable, vers une industrie sans pétrole, verrait la fin de leur empire. Et cela, ils ne peuvent l'accepter.

vendredi 5 octobre 2012

Les jeunes d'aujourd'hui




Les jeunes d'aujourd'hui sont nés dans un monde qui s'est détourné de la nature que nos modes de vie ont défigurée. Leur univers familier porte la marque du monde virtuel dans lequel les adultes les ont enfermés.
Leur personnalité se nourrit de feuilletons médiocres, de films et de jeux vidéo qui leur enseignent la violence, la cupidité, le cynisme.
Ces maux de notre époque ont franchi le seuil des écoles.
Les jeunes d'aujourd'hui, du moins ceux dont les parents vivent pauvrement, sentent que l'école où beaucoup d'entre eux s'ennuient ne leur apportera pas les clés de la réussite.
Les jeunes d'aujourd'hui ont besoin d'espérer, comme ceux de ma génération ont pu le faire, au contact de la nature, de l'école et de lectures qui stimulaient notre imaginaire : Jack London, Pierre Loti, Saint-Exupéry, Rimbaud et bien d'autres.
Rater ses études n'était pas trop dramatique ; ceux qui n'avaient aucun diplôme savaient qu'ils trouveraient un travail, souvent même à proximité de leur lieu d'habitation. Pour les diplômés, c'était l'assurance d'une carrière sans histoire.

Il est injuste de jeter le discrédit sur les jeunes d'aujourd'hui parce que le comportement d'une minorité n'est pas conforme aux règles établies par la société.

On attend de celle-ci qu'elle apporte une espérance aux jeunes, que l'école ne soit pas un lieu où les plus faibles se sentent exclus, on attend des entreprises qu'elles intègrent plus facilement les jeunes sans expérience.

En cette année 2012 déclarée année européenne de la solidarité entre générations, faisons avancer l'idée qu'il faut redonner confiance aux jeunes.

lundi 1 octobre 2012

Paroles de chat (1)


      Photo Freerange ( Don Denton)

Je m'appelle Platon. Je dois ce nom qui sort de l'ordinaire au monsieur qui m'a recueilli il y a maintenant dix ans. Il s'appelle Boris et il est prof de français dans un lycée de la ville voisine. C'est lui qui m'a trouvé, un matin de juillet, au fond de son jardin. Ne me demandez pas comment je m'étais retrouvé là, je ne m'en souviens pas. J'ai sans doute été abandonné par des gens du quartier qui ne tenaient pas trop à ma présence.

Boris ( je ne dis pas Mon maître car je l'ai entendu dire qu'il avait horreur de cette expression) est marié avec Sylvie, une jolie femme qui exerce la profession de sophrologue. Ils ont une petite fille qui vient d'avoir six ans, Emma. Je m'entends bien avec elle car elle est très gentille. Ils ont aussi un garçon de trois ans, un petit diable prénommé Jules que je trouve beaucoup moins sympathique ; il ne cesse de m'ennuyer et dès que je le vois s'approcher de moi, je préfère me réfugier sous un meuble pour être au calme.

Dès qu'ils m'ont trouvé, Sylvie et Boris m'ont emmené chez le vétérinaire pour être sûrs que j'étais en bonne santé et pour qu'on me fasse les vaccins nécessaires. Le vétérinaire a dit que j'avais deux mois et il a écrit sur mon carnet de santé que j'étais né le premier mai. C'est ce qui a fait dire à Sylvie :
Quelle coïncidence ! Il est né le même jour que moi !
C'est sans doute à cause de ça que j'ai droit moi aussi à mon cadeau d'anniversaire.

Je ne vais pas me plaindre de la famille dans laquelle je me trouve, je sais que beaucoup de mes congénères n'ont pas une aussi belle vie. On m'a même réservé un fauteuil dans un coin du salon ; c'est un formidable lieu d'observation. Il faut le dire : je m'amuse beaucoup en regardant cette aimable famille.
Sylvie par exemple ! Elle a beau être sophrologue, elle est souvent énervée. Les méthodes qu'elle propose aux autres n'ont pas l'air de lui convenir. Depuis quelques semaines, elle me paraît encore plus agitée. Elle doit avoir un problème, je voudrais bien savoir pourquoi elle est dans cet état.

( à suivre)


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