La
bride sur le cou: décontracté, détendu, lâché, libre ( Le
Robert, dictionnaire des synonymes)
Le
choix du mot juste
Il
n’a échappé à personne que notre pays est en train de glisser
sur une pente dangereuse, et la période électorale qui s’annonce
n’arrangera pas les choses.
En
effet, avec une gauche émiettée,
affaiblie par les renoncements du gouvernement,
une écologie politique meurtrie par les
ambitions personnelles et une droite
ayant tendance – à quelques exceptions près – à reprendre
les solutions des
extrémistes, il faudrait un choc
imprévisible à ce jour pour qu’une solution aux problèmes
actuels sorte des urnes l’an prochain.
L’actualité
montre que les questions les plus ordinaires ne peuvent être
résolues si elles ne sont pas traitées sous l’angle de la
complexité. Il apparaît également nécessaire de revoir certains
mots du vocabulaire.
Burkini
Prenons
le cas du burkini, banale affaire de vêtement de plage transformé par certains observateurs et politiciens en outil de propagande du
djihadisme.
Ceux qui ont créé cet habit ont cru bon de faire
référence à deux tenues, la burqa symbole de la femme qui couvre
son corps et le bikini présenté dans
les années 1950 comme un symbole de l’émancipation féminine. Or
le « burkini » n’est ni l’un ni l’autre. On aurait
sans doute évité de nombreux amalgames en l’appelant autrement.
Le
plus grave est que cette affaire banale ait servi de prétexte pour
stigmatiser les personnes de religion musulmane (rappelons que le
Coran n’impose rien d’autre
qu’ « une tenue modeste »),
pour humilier des femmes portant ce vêtement et pour empêcher dans certaines villes d’aller librement sur la plage où la
loi n’interdit qu’une chose : la nudité intégrale.
Intégration
Voici
un autre mot qui pose problème. Quelle est sa définition selon le
Robert ?
« intégration :
assimilation d’un individu ou d’un groupe à une communauté, à
un groupe social »
Or
l’assimilation consiste à considérer que l’autre est semblable
à vous-même. En d’autres termes, c’est nier sa différence, sa
culture originelle, ses racines.
Cette
conception qui est celle des mouvements hostiles aux populations
étrangères est contraire à la réalité historique. Depuis
plusieurs générations les Français d’origine polonaise
continuent de faire connaître leurs chants, leurs danses, leurs
coutumes ; la cuisine française s’est enrichie de recettes
venant d’ailleurs ; les livres et les musiques du monde ont
pénétré en France.
Certains préconisent aujourd’hui un repli sur soi, c'est le signe que la xénophobie et le racisme grimpent en France.
Migrant
Michel
Butor qui vient de nous quitter il y a
quelques jours était un remarquable écrivain.
Il
avait accordé en mai un long entretien au magazine Lire.
La
distinction entre réfugié politique et économique l’agaçait.
En
ce qui concerne le migrant, il déclarait :
« Cette
notion de migrant est une erreur. »
Et
il rappelait que la migration consiste à aller d’un point à un
autre « comme les oiseaux migrateurs. »
Or ceux qu'on appelle migrants sont des gens qui fuient, qui cherchent un refuge.
Il
faut donc trouver un autre mot qui traduise la réalité, disait Michel Butor.
Employer
le mot juste, c'est la condition nécessaire pour entamer un
dialogue constructif.