Le citoyen français a le droit de prendre part à la vie démocratique ; il peut s’engager dans la vie politique en votant, en y étant actif, en étant élu. Il peut adhérer à un syndicat, participer à une association, à des actions collectives...
Le champ de la citoyenneté est donc large. Mais, au-delà des définitions et des textes, quelle est la réalité de la vie citoyenne en France ?
Depuis deux décennies, celle-ci connaît une crise qui touche le domaine politique ( perte de crédibilité des politiques, taux d’abstention élevé lors des élections) et le domaine social ( le dialogue salariés/patronat fonctionne mal, le droit au travail pour tous n’est pas respecté ; le chômage reste élevé et la précarité persiste)
La démocratie est en panne dans la vie politique pour plusieurs raisons.
L’élection du président de la République au suffrage universel l’a paralysée en concentrant les pouvoirs dans les mains d’un seul homme ; elle a eu pour conséquence de transformer les partis en « écuries » présidentielles ; cela a favorisé les grandes formations ( deux d’entre elles, puis trois actuellement).
Le fait de ne pas adopter la proportionnelle ( qui est le seul système juste ) a écarté des lieux décisionnels les porteurs d’idées minoritaires et a poussé certains d’entre eux à nouer des alliances dans lesquelles leur discours et leur action ont perdu une partie de leur force.
Si l’on ajoute à cela un mode de fonctionnement archaïque des partis où chaque camp se contente de soutenir ou de contrer le gouvernement en place, on comprend l’appauvrissement du débat démocratique actuel, illustré par le dernier « référendum » organisé dernièrement par le PS, une consultation qualifiée - sans rire - de succès alors qu’elle n’a recueilli que 250 000 votes ( rappelons que les voix de gauche s’élevaient au 2e tour de la présidentielle de 2012 à 18 millions !)
Le citoyen de 2015 n’a que faire de ces manœuvres : pour lui la politique sert à résoudre les problèmes de la société ; il veut que les promesses soient tenues, il souhaite être écouté et il aimerait pouvoir participer davantage à la vie de la cité.
Devant ce déficit de citoyenneté, il est nécessaire de sortir du schéma actuel des partis qui attirent de moins en moins de monde et inventer de nouvelles formes d’engagement qui favoriseraient le débat, où la parole serait plus libre, où les positions ne seraient pas figées à jamais. En effet, sur certaines questions, des majorités peuvent se créer hors du clivage des partis.
La citoyenneté dans l’entreprise ou l’administration ne se porte pas mieux.
L’autogestion qui est la forme la plus élaborée de la démocratie sur le lieu de travail ne fait plus recette.
En France le syndicalisme attire moins les salariés que dans les autres pays européens ( 8% de syndiqués seulement selon le magazine Challenges, 74 % en Finlande).
Le dialogue social est de plus en plus difficile. Le salarié se sent méprisé car il sait qu’il n’est pas au cœur du projet de l’entreprise. Ses droits sont de plus en plus menacés.
Aujourd’hui tout travailleur, qu’il soit ouvrier ou cadre, vit dans la crainte du chômage. Tous les secteurs sont touchés ; on a eu récemment un exemple effarant du management moderne dans le monde des médias avec la mise à l’écart, par le seul fait du prince, des principaux cadres de Canal +.
Dans de telles conditions, l’exercice de la citoyenneté devient impossible. Seule une autre forme d’économie peut garantir le respect de ce droit.