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samedi 14 mars 2015

Repères n°37 : Les mots de la politique


Repères : une série de billets qui présentent de manière synthétique les questions de notre temps ; des réflexions basées sur l'observation, l'expérience, les souvenirs  personnels et la théorie. 


n° 37

 Les mots de la politique

Il y a quelques jours, le Premier ministre s’en prenait à un philosophe, Michel Onfray, qu’il accusait de « perdre les repères ». 
Comme depuis près d’un an, j’ai entrepris de me pencher sur cette question des repères - qui sont pour la plupart devenus flous dans la société moderne - la remarque de Manuel Valls a attiré mon attention.
On peut critiquer le philosophe sur certaines de ses positions récentes, mais faire de lui un responsable de la perte des repères dans la vie politique française est injuste. C’est l’ensemble de la classe politique qu’il faut accuser d’avoir entretenu le flou en utilisant des mots qui ne correspondent plus à la réalité.

La première ambiguïté  vient du clivage gauche / droite, remontant à 1789, idée simplificatrice et réductrice qui mettait d’un côté les partisans de l’ordre, de l’autorité, du conservatisme et de l’autre les progressistes, favorables à l’égalité et à la solidarité. 
Dans la réalité, il faut reconnaître que des passerelles existent entre les deux camps. 
Droite et gauche constituaient dans les assemblées les principaux groupes, à côté desquels siégeaient des groupes moins importants, situés au centre et aux  extrêmes.
L’arrivée des écologistes dans le champ politique a rendu caduque ce vieux schéma linéaire.
Bien que la plupart d’entre eux se sentent proches de la gauche, leur vision de la société diffère de celle des autres partis : ils intègrent dans leur réflexion la complexité de la société, la priorité donnée aux problèmes environnementaux les amène à refuser le productivisme et ils préconisent la démocratie participative.
 Le vrai clivage politique aujourd’hui est, à mes yeux, dans le positionnement vis-à-vis du productivisme.

Par ailleurs, où place-t-on, en 2015, la frontière entre la gauche et la droite ? Elle est devenue de moins en moins claire depuis que les socialistes sont revenus au pouvoir et qu’ils mènent une politique économique basée sur les principes du libéralisme. Même la politique sociale, au niveau national, se distingue peu de la précédente.
On constate donc que les vrais repères de la gauche historique, ceux qui avaient marqué les esprits au temps du Front populaire, ont été délaissés par ceux qui nous gouvernent.

Dans le même souci de clarté, si l’on veut que les mots utilisés aient encore un sens, il serait nécessaire que les différents partis aient des noms qui correspondent à ce qu’ils sont.
Le problème n’est pas propre à la France ; on note partout la présence de partis qui masquent leurs intentions : aux Pays-Bas, un parti nationaliste s’appelle PVV (partij voor de vrijheid - parti pour la liberté).
Chez nous, le PS a oublié le socialisme de Jaurès pour se convertir à la social-démocratie, certains parlent même de dérive vers un socialisme libéral. L'étiquette est devenue une information fausse.

La semaine prochaine, nous allons voter. Des dizaines de sigles obscurs apparaîtront sur les bulletins. Je ne pense pas que ce manque de clarté serve la démocratie.

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