LA COULEUR DU RAISIN
Le
pouvoir des mots est magique. Impressions fugitives qui
deviennent poèmes, personnages sortis de l'imagination autour
desquels s'articule le roman, et dans la vie de tous les jours,
échanges entre les êtres, tout passe par les mots.
Leur
utilisation n'est pas toujours aisée : les mots ont souvent
plusieurs sens, ils ont une résonance particulière pour chacun de
nous ; il y a aussi, d'un
pays
à l'autre, la barrière de la langue.
Les
mots techniques ou savants utilisés par le philosophe ou le médecin
risquent de ne pas être compris par de nombreuses personnes, des
mots du langage courant peuvent aussi contenir des erreurs
d’appréciation ; c’est le cas de la couleur du raisin.
Chez
le marchand, vous demandez une livre de raisin blanc et une livre de
raisin noir, presque machinalement, parce que depuis toujours vous
avez entendu désigner ainsi les couleurs du raisin.
Si
vous regardez le grain de couleur claire, il est évident que
l'épithète blanc lui sied très mal : ce "
blanc" ne peut être comparé à celui de la neige ou au blanc
de la robe de mariée.
Selon
les variétés, la couleur de ce raisin tire sur le vert (mais parler
de raisin vert, c'est évoquer un fruit qui n'est pas mûr). Disons
plutôt qu'il est verdâtre avec des parties jaunâtres et parfois
même dorées. Seule une description précise, telle que la fait un
scientifique ou un écrivain peut qualifier sa couleur.
Le
grain de couleur foncée pose les mêmes interrogations.
Le noir qu'on lui attribue n'est pas celui du
charbon ou de l'habit de deuil. Sa couleur peut tirer vers le rouge
ou le violet. Rouge violacé pourrait alors convenir. Mais certains
grains sont plutôt bleus. C'est d'ailleurs sous cette couleur que
le néerlandais le désigne (blauwe druif).
Que
conclure de ces quelques remarques ?
D'abord
il faut admettre que l’utilité du langage est évidente puisque
celui-ci permet la communication entre les êtres mais en même
temps lorsqu’elle se fait par le biais des mots on risque de créer
des malentendus liés à leur complexité et au fait que ces mots
peuvent être perçus différemment d’une personne à l’autre.
Il faut donc se méfier d’eux
et les manier avec prudence. Ésope
l’avait déjà dit en son temps : « La langue est
la pire et la meilleure des choses. »
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