Itinéraire d’un poème : Ces chevaux qu'on abat
Comment naît un poème ? Chaque auteur a sa méthode et rien, dans le domaine de la création, n’est immuable. Mais cependant, il est possible de définir certains principes.
En ce qui me concerne, la démarche comprend trois étapes. Illustrons cela par un exemple.
1. Le déclic ( l’inspiration)
Au printemps 2012, dans le cadre de la préparation à un entretien d’embauche, j’interrogeais une étudiante.
Parlant de ses loisirs, elle me dit qu’elle aime les chevaux et qu’elle fait de l’équitation. Alors je lui dis :
- Vous ne faites sûrement pas partie des amateurs de viande de cheval !
Elle me regarde étonnée, avant de répondre :
- J’en mange, et c’est très bon.
Ce n’était pas le lieu qui convenait à un débat. Je passais à autre chose. Mais l’envie de partager la tristesse que j’éprouve devant la mort d’un animal (notamment celle d’un cheval qui a beaucoup couru, beaucoup travaillé pour l’homme et qu’on envoie à l’abattoir plutôt que lui offrir une vieillesse paisible) était forte.
Dans les jours qui suivirent, je notais quelques idées pour évoquer le sort de ces chevaux.
3. Le texte définitif *
( Il est rare qu’un premier jet donne satisfaction à son auteur.)
Le texte ci-dessus a été retravaillé à plusieurs reprises pour améliorer le rythme et renforcer la violence de la situation. Cinq mois plus tard le poème avait trouvé sa forme définitive.
Aux barbelés barbares de l'oubli
il a suspendu son galop, arraché sa crinière,
retenu un sanglot.
Le vieux cheval attend la nuit
et dans les yeux de l'enfant qui passe
il ne voit plus la lumière
des grands espaces.
Il devine la mort, la porte qu'on referme,
la lame qui s’élance
vers son corps fatigué
Et le sang jaillissant
dans la pâleur de l'aube.
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